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    mardi, 25 avril 2023 06:41

    Contentieux des permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale : Les moyens de légalité commerciale sont à leurs tours cristallisés

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    La cristallisation des moyens prévue par les dispositions de l'article R. 600-5 du code de l'urbanisme s'applique au recours formé contre un permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale par une personne mentionnée à l'article L. 752-17 du code de commerce.

    cristallisation

     

    L’article R. 600-5 du code de l’urbanisme dispose :

    « Par dérogation à l'article R. 611-7-1 du code de justice administrative, et sans préjudice de l'application de l'article R. 613-1 du même code, lorsque la juridiction est saisie d'une requête relative à une décision d'occupation ou d'utilisation du sol régie par le présent code, ou d'une demande tendant à l'annulation ou à la réformation d'une décision juridictionnelle concernant une telle décision, les parties ne peuvent plus invoquer de moyens nouveaux passé un délai de deux mois à compter de la communication aux parties du premier mémoire en défense. Cette communication s'effectue dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article R. 611-3 du code de justice administrative ».

    Dans le cas d’un permis de construire tenant lieu d’autorisation d’exploitation commerciale, le Conseil d’Etat a été saisi de la question de savoir si cette cristallisation des moyens concernait les deux facettes de ce permis, à la fois l’autorisation de construire et l’autorisation d’exploitation commerciale.

    Par un arrêt du 4 avril 2023, le Conseil d’Etat a répondu par l’affirmative :

    « 2. En premier lieu, d'une part, aux termes de l'article L. 425-4 du code de l'urbanisme : " Lorsque le projet est soumis à autorisation d'exploitation commerciale au sens de l'article L. 752-1 du code de commerce, le permis de construire tient lieu d'autorisation dès lors que la demande de permis a fait l'objet d'un avis favorable de la commission départementale d'aménagement commercial ou, le cas échéant, de la Commission nationale d'aménagement commercial ". D'autre part, aux termes de l'article L. 600-13 du code de l'urbanisme : " Les dispositions du présent livre sont applicables aux recours pour excès de pouvoir formés contre les permis de construire qui tiennent lieu d'autorisation au titre d'une autre législation, sauf disposition contraire de cette dernière ". Enfin, aux termes de l'article R. 600-5 du même code : " Par dérogation à l'article R. 611-7-1 du code de justice administrative, et sans préjudice de l'application de l'article R. 613-1 du même code, lorsque la juridiction est saisie d'une requête relative à une décision d'occupation ou d'utilisation du sol régie par le présent code, ou d'une demande tendant à l'annulation ou à la réformation d'une décision juridictionnelle concernant une telle décision, les parties ne peuvent plus invoquer de moyens nouveaux passé un délai de deux mois à compter de la communication aux parties du premier mémoire en défense. Cette communication s'effectue dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article R. 611-3 du code de justice administrative (...) /. Le président de la formation de jugement, ou le magistrat qu'il désigne à cet effet, peut, à tout moment, fixer une nouvelle date de cristallisation des moyens lorsque le jugement de l'affaire le justifie ". Il résulte de ces dispositions que la cristallisation des moyens prévue par les dispositions de l'article R. 600-5 du code de l'urbanisme s'applique au recours formé contre un permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale par une personne mentionnée à l'article L. 752-17 du code de commerce.

     3. Si la société Distribution Casino France soutient que la cour administrative d'appel ne pouvait écarter comme irrecevable l'un des moyens qu'elle avait soulevé, en faisant application des dispositions de l'article R. 600-5 du code de l'urbanisme, dès lors que le recours dont elle l'avait saisie ne tendait à l'annulation pour excès de pouvoir du permis de construire délivré par le maire de Nice qu'en tant qu'il vaut autorisation d'exploitation commerciale, il résulte de ce qui a été dit au point précédent que la cour administrative d'appel de Marseille n'a ce faisant commis aucune erreur de droit (…) ».

    L’application au contentieux du permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale de règles du contentieux de l’urbanisme est ancienne, avec par exemple l’application de la formalité de notification prévue à l’article R. 600-1 du code de l’urbanisme :

    « 10. L'article R. 600-2 du code de l'urbanisme dispose que : " Le délai de recours contentieux à l'encontre d'une décision de non-opposition à une déclaration préalable ou d'un permis de construire, d'aménager ou de démolir court à l'égard des tiers à compter du premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain des pièces mentionnées à l'article R. 424-15 ". Les professionnels mentionnés au I de l'article L. 752-17 du code de commerce sont des tiers au sens de ces dispositions. Ils bénéficient d'une information sur l'existence de la demande de permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale en raison, notamment, de la publicité donnée à la décision de la commission départementale d'aménagement commercial en application des dispositions de l'article R. 752-30 du code de commerce. Ainsi, bien qu'ils ne soient pas nécessairement voisins du projet, le délai de recours contentieux à l'encontre du permis court à leur égard, comme pour tout permis de construire, à compter de la date prévue par les dispositions citées ci-dessus de l'article R. 600-2 du code de l'urbanisme.

    11. Pour les professionnels mentionnés au I de l'article L.752-17 du code de commerce, la saisine de la Commission nationale d'aménagement commercial est, en vertu du même article et des dispositions analogues de l'article L.425-4 du code de l'urbanisme, un préalable obligatoire à tout recours contentieux contre un permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale. Eu égard au délai d'un mois dans lequel cette saisine doit intervenir, il sera exceptionnel qu'elle soit régulièrement introduite avant que le délai de recours contre le permis, déclenché ainsi qu'il a été dit au point précédent, soit expiré. Même alors, cette saisine n'aurait pas pour effet d'interrompre le délai de recours contentieux. En revanche, dans tous les cas où la Commission nationale d'aménagement commercial, régulièrement saisie, est amenée à rendre son avis après la délivrance du permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale, la publication de cet avis dans les conditions fixées à l'article R. 752-39 du code de commerce ouvre, à l'égard des requérants mentionnés au I de l'article L. 752-17 du code de commerce, y compris si le délai déclenché dans les conditions prévues par l'article R. 600-2 du code de l'urbanisme est expiré, un délai de recours de deux mois contre le permis.

    12. Enfin, aux termes du premier alinéa de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme : " En cas de déféré du préfet ou de recours contentieux à l'encontre (...) d'un permis de construire, d'aménager ou de démolir, le préfet ou l'auteur du recours est tenu, à peine d'irrecevabilité, de notifier son recours à l'auteur de la décision et au titulaire de l'autorisation. Cette notification doit également être effectuée dans les mêmes conditions en cas de demande tendant à l'annulation ou à la réformation d'une décision juridictionnelle concernant (...) un permis de construire, d'aménager ou de démolir. L'auteur d'un recours administratif est également tenu de le notifier à peine d'irrecevabilité du recours contentieux qu'il pourrait intenter ultérieurement en cas de rejet du recours administratif ". Ces dispositions s'appliquent, comme pour tout permis de construire, au recours formé par un professionnel mentionné au I de l'article L. 752-17 du code de commerce contre un permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale. » (CE, 23 décembre 2016, n° 398077).

    L'autorisation unique, tenant lieu d’autorisation d’exploitation commerciale, attire donc les règles relatives au contentieux de l'urbanisme.