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    La cristallisation des moyens prévue par les dispositions de l'article R. 600-5 du code de l'urbanisme s'applique au recours formé contre un permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale par une personne mentionnée à l'article L. 752-17 du code de commerce.

    cristallisation

     

    L’article R. 600-5 du code de l’urbanisme dispose :

    « Par dérogation à l'article R. 611-7-1 du code de justice administrative, et sans préjudice de l'application de l'article R. 613-1 du même code, lorsque la juridiction est saisie d'une requête relative à une décision d'occupation ou d'utilisation du sol régie par le présent code, ou d'une demande tendant à l'annulation ou à la réformation d'une décision juridictionnelle concernant une telle décision, les parties ne peuvent plus invoquer de moyens nouveaux passé un délai de deux mois à compter de la communication aux parties du premier mémoire en défense. Cette communication s'effectue dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article R. 611-3 du code de justice administrative ».

    Dans le cas d’un permis de construire tenant lieu d’autorisation d’exploitation commerciale, le Conseil d’Etat a été saisi de la question de savoir si cette cristallisation des moyens concernait les deux facettes de ce permis, à la fois l’autorisation de construire et l’autorisation d’exploitation commerciale.

    Par un arrêt du 4 avril 2023, le Conseil d’Etat a répondu par l’affirmative :

    « 2. En premier lieu, d'une part, aux termes de l'article L. 425-4 du code de l'urbanisme : " Lorsque le projet est soumis à autorisation d'exploitation commerciale au sens de l'article L. 752-1 du code de commerce, le permis de construire tient lieu d'autorisation dès lors que la demande de permis a fait l'objet d'un avis favorable de la commission départementale d'aménagement commercial ou, le cas échéant, de la Commission nationale d'aménagement commercial ". D'autre part, aux termes de l'article L. 600-13 du code de l'urbanisme : " Les dispositions du présent livre sont applicables aux recours pour excès de pouvoir formés contre les permis de construire qui tiennent lieu d'autorisation au titre d'une autre législation, sauf disposition contraire de cette dernière ". Enfin, aux termes de l'article R. 600-5 du même code : " Par dérogation à l'article R. 611-7-1 du code de justice administrative, et sans préjudice de l'application de l'article R. 613-1 du même code, lorsque la juridiction est saisie d'une requête relative à une décision d'occupation ou d'utilisation du sol régie par le présent code, ou d'une demande tendant à l'annulation ou à la réformation d'une décision juridictionnelle concernant une telle décision, les parties ne peuvent plus invoquer de moyens nouveaux passé un délai de deux mois à compter de la communication aux parties du premier mémoire en défense. Cette communication s'effectue dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article R. 611-3 du code de justice administrative (...) /. Le président de la formation de jugement, ou le magistrat qu'il désigne à cet effet, peut, à tout moment, fixer une nouvelle date de cristallisation des moyens lorsque le jugement de l'affaire le justifie ". Il résulte de ces dispositions que la cristallisation des moyens prévue par les dispositions de l'article R. 600-5 du code de l'urbanisme s'applique au recours formé contre un permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale par une personne mentionnée à l'article L. 752-17 du code de commerce.

     3. Si la société Distribution Casino France soutient que la cour administrative d'appel ne pouvait écarter comme irrecevable l'un des moyens qu'elle avait soulevé, en faisant application des dispositions de l'article R. 600-5 du code de l'urbanisme, dès lors que le recours dont elle l'avait saisie ne tendait à l'annulation pour excès de pouvoir du permis de construire délivré par le maire de Nice qu'en tant qu'il vaut autorisation d'exploitation commerciale, il résulte de ce qui a été dit au point précédent que la cour administrative d'appel de Marseille n'a ce faisant commis aucune erreur de droit (…) ».

    L’application au contentieux du permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale de règles du contentieux de l’urbanisme est ancienne, avec par exemple l’application de la formalité de notification prévue à l’article R. 600-1 du code de l’urbanisme :

    « 10. L'article R. 600-2 du code de l'urbanisme dispose que : " Le délai de recours contentieux à l'encontre d'une décision de non-opposition à une déclaration préalable ou d'un permis de construire, d'aménager ou de démolir court à l'égard des tiers à compter du premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain des pièces mentionnées à l'article R. 424-15 ". Les professionnels mentionnés au I de l'article L. 752-17 du code de commerce sont des tiers au sens de ces dispositions. Ils bénéficient d'une information sur l'existence de la demande de permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale en raison, notamment, de la publicité donnée à la décision de la commission départementale d'aménagement commercial en application des dispositions de l'article R. 752-30 du code de commerce. Ainsi, bien qu'ils ne soient pas nécessairement voisins du projet, le délai de recours contentieux à l'encontre du permis court à leur égard, comme pour tout permis de construire, à compter de la date prévue par les dispositions citées ci-dessus de l'article R. 600-2 du code de l'urbanisme.

    11. Pour les professionnels mentionnés au I de l'article L.752-17 du code de commerce, la saisine de la Commission nationale d'aménagement commercial est, en vertu du même article et des dispositions analogues de l'article L.425-4 du code de l'urbanisme, un préalable obligatoire à tout recours contentieux contre un permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale. Eu égard au délai d'un mois dans lequel cette saisine doit intervenir, il sera exceptionnel qu'elle soit régulièrement introduite avant que le délai de recours contre le permis, déclenché ainsi qu'il a été dit au point précédent, soit expiré. Même alors, cette saisine n'aurait pas pour effet d'interrompre le délai de recours contentieux. En revanche, dans tous les cas où la Commission nationale d'aménagement commercial, régulièrement saisie, est amenée à rendre son avis après la délivrance du permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale, la publication de cet avis dans les conditions fixées à l'article R. 752-39 du code de commerce ouvre, à l'égard des requérants mentionnés au I de l'article L. 752-17 du code de commerce, y compris si le délai déclenché dans les conditions prévues par l'article R. 600-2 du code de l'urbanisme est expiré, un délai de recours de deux mois contre le permis.

    12. Enfin, aux termes du premier alinéa de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme : " En cas de déféré du préfet ou de recours contentieux à l'encontre (...) d'un permis de construire, d'aménager ou de démolir, le préfet ou l'auteur du recours est tenu, à peine d'irrecevabilité, de notifier son recours à l'auteur de la décision et au titulaire de l'autorisation. Cette notification doit également être effectuée dans les mêmes conditions en cas de demande tendant à l'annulation ou à la réformation d'une décision juridictionnelle concernant (...) un permis de construire, d'aménager ou de démolir. L'auteur d'un recours administratif est également tenu de le notifier à peine d'irrecevabilité du recours contentieux qu'il pourrait intenter ultérieurement en cas de rejet du recours administratif ". Ces dispositions s'appliquent, comme pour tout permis de construire, au recours formé par un professionnel mentionné au I de l'article L. 752-17 du code de commerce contre un permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale. » (CE, 23 décembre 2016, n° 398077).

    L'autorisation unique, tenant lieu d’autorisation d’exploitation commerciale, attire donc les règles relatives au contentieux de l'urbanisme.

     

    Focus sur l’arrêt rendu le 15 février 2023 par la 3ème chambre civile de la Cour de cassation, (pourvoi n° 21-16.475).

    Le locataire d’un bail commercial jouit depuis la réforme Pinel d’un droit de préemption lorsque le bailleur vend le local loué, dans les conditions de l’article L. 145-46-1 du Code de commerce.

    Toutefois, le Cour de cassation vient rappeler que cet article ne vise que les ventes volontaires, à l’exclusion des ventes judiciaires. Ainsi, le locataire n’a aucun droit particulier en cas de vente du local « faite d’autorité de justice ». Tel est le cas par exemple en cas de vente consécutive à une saisie immobilière (CA Bastia, 20 janvier 2016, n° 15/00833), en cas de vente sur adjudication intervenue dans le cadre d’une liquidation amiable (Cass. 3ème civ., 17 mai 2018, n° 17-16.113), ou, comme c’est le cas dans notre actualité, en cas de vente de gré à gré autorisée par le juge commissaire dans le cadre de la liquidation judiciaire du bailleur.

    La décision est logique dans la mesure où le bailleur n’a pas la main sur les conditions de la vente à proposer à son locataire. Toutefois, notre arrêt marque les limites pratiques de cette restriction, dans la mesure où le locataire avait en l’espèce formulée une offre à un meilleur prix. Ainsi, il n’est pas certain que l’intérêt des créanciers, ni celui du dirigeant qui a pu se porter caution personnelle de certaines dettes (et vous savez combien ce sujet me tient à cœur...), aient été préservé. Un vide juridique à combler ? On pourrait imaginer que, sans allonger les délais de procédure dans ces situations complexes et urgentes qui nécessitent l’intervention de la justice, une place préférentielle soit aménagée au profit du locataire désireux de formuler une meilleure offre que celle retenue.

    Encore minoritaires, les contrats conclus postérieurement au 1er octobre 2016 (donc soumis au droit nouveau) sont peu commentés par la jurisprudence.

    L’arrêt rendu par la Chambre commerciale de la Cour de cassation, le 18 janvier 2023 (n°21-16812) est apporte des précisions sur le nouveau régime de la résolution judiciaire du contrat.

    En l’espèce, un contrat de prestations de services en vue d’un événement déterminé avait été conclu entre une société exploitant un établissement d’hôtel-restaurant et une société prestataire. L’évènement prévu dans le contrat a été reporté puis annulé en raison de la crise sanitaire. La société prestataire a cependant, malgré mise en demeure de la société d’hôtellerie-restauration, refusé de restituer l’acompte versé au titre du contrat au motif que le contrat n’était pas résilié.

    La cour d’appel d’Aix-en-Provence a rejeté les demandes de résolution du contrat de prestations de services de la société hôtelière car le prestataire de service n’avait commis aucune faute.

    La Cour de cassation censure partiellement l’arrêt d’appel en précisant que « La résolution peut, en toute hypothèse, être demandée en justice et met fin au contrat. Lorsque les prestations échangées ne pouvaient trouver leur utilité que par l’exécution complète du contrat résolu, les parties doivent restituer l’intégralité de ce qu’elles se sont procuré l’une à l’autre ».

    Pour fonder sa demande la Cour invoque plusieurs articles du code civil :

    • l’article 1217 du code civil sur l’inexécution contractuelle ;
    • l’article 1227 sur la résolution judiciaire ;
    • et l’article 1229 prévoyant la résolution comme cause de fin du contrat du code civil.

    Cet arrêt précise les conditions d’application de l’article 1227 du code civil, en affirmant que la démonstration d’une faute du débiteur n’est pas obligatoire pour solliciter la résolution judiciaire du contrat.

    En effet, selon la Haute juridiction, il suffira pour la partie envers laquelle l’engagement n’a pas été exécuté, de justifier de l’inexécution suffisamment grave de son cocontractant pour obtenir la résiliation judiciaire.

    En l’espèce, la résiliation permet la restitution de l’acompte versé en vue de l’exécution de la prestation.

    Il sera intéressant de savoir si ce raisonnement sera confirmé par la chambre civile de la Cour de cassation. La suite au prochain épisode.

    L'illégalité d'une décision de modification du délai d’instruction fixant un délai inapplicable a pour effet de rendre le pétitionnaire titulaire d’un permis tacite, a jugé le tribunal administratif de Marseille.

     

    permis tacite

    L’illégalité des mesures d’instruction prises par l’autorité compétente pour délivrer une autorisation d’urbanisme bénéficiait, jusqu’à récemment, d’une relative innocuité. Ainsi, une demande de pièces complémentaires infondée ne rendait pas le demandeur titulaire d’un permis tacite (CE, 90 décembre 2015, n° 390273), pas plus qu’une prolongation illégale du délai d’instruction (CAA de Marseille, chambre réunies, 5 avril 2017, n° 15MA01348).

    Cette innocuité a connu un net recul, illustré par le (déjà célèbre) arrêt « commune de Saint-Herblain », rendu le 9 décembre 2022 par le Conseil d’Etat. Celui-ci a jugé que, à la suite des modifications des articles L. 423-1 et R. 423-41 du code de l’urbanisme opérées par la loi du 23 novembre 2018 (dite « loi ELAN ») et le décret du 21 mai 2019 pris pour son application, l'illégalité d'une demande tendant à la production d'une pièce qui ne peut être requise a désormais pour effet de rendre le demandeur titulaire d'une autorisation tacite :

    « 4. (…) Aux termes de l'article R. 423-41 du même code dans sa rédaction issue du décret du 21 mai 2019 modifiant diverses dispositions du code de l'urbanisme pris pour l'application de la loi du 23 novembre 2018 : " Une demande de production de pièce manquante notifiée après la fin du délai d'un mois prévu à l'article R*423-38 ou ne portant pas sur l'une des pièces énumérées par le présent code n'a pas pour effet de modifier les délais d'instruction définis aux articles R*423-23 à R*423-37-1 et notifiés dans les conditions prévues par les articles R*423-42 à R*423-49. ". Enfin, l'article R. 424-1 du même code prévoit qu'à défaut de notification d'une décision expresse dans le délai d'instruction, déterminé comme il vient d'être dit, le silence gardé par l'autorité compétente vaut décision de non-opposition à la déclaration préalable.

    5. Il résulte de ces dispositions qu'à l'expiration du délai d'instruction tel qu'il résulte de l'application des dispositions du chapitre III du titre II du livre IV du code de l'urbanisme relatives à l'instruction des déclarations préalables, des demandes de permis de construire, d'aménager ou de démolir, naît une décision de non-opposition à déclaration préalable ou un permis tacite. En application de ces dispositions, le délai d'instruction n'est ni interrompu, ni modifié par une demande, illégale, tendant à compléter le dossier par une pièce qui n'est pas exigée en application du livre IV de la partie réglementaire du code de l'urbanisme. Dans ce cas, une décision de non-opposition à déclaration préalable ou un permis tacite naît à l'expiration du délai d'instruction, sans qu'une telle demande puisse y faire obstacle» (CE, 9 décembre 2022, n° 454521).

    Cette innocuité connait aujourd’hui un nouveau recul, selon le tribunal administratif de Marseille, qui a jugé que la modification illégale du délai d’instruction a elle aussi pour effet de rendre le demandeur titulaire d'une autorisation tacite :

    « 2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 424-2 du code de l'urbanisme : « Le permis est tacitement accordé si aucune décision n'est notifiée au demandeur à l'issue du délai d'instruction. ». Aux termes de l’article R. 423-23 de ce code : « Le délai d'instruction de droit commun est de : / (…) / c) Trois mois pour les autres demandes de permis de construire et pour les demandes de permis d'aménager ». Aux termes de l’article R. 423-38 du code de l’urbanisme : « Lorsque le dossier ne comprend pas les pièces exigées en application du présent livre, l’autorité compétente, dans le délai d’un mois à compter de la réception ou du dépôt du dossier à la mairie, adresse au demandeur ou à l’auteur de la déclaration une lettre recommandée avec demande d’avis de réception (…) indiquant, de façon exhaustive, les pièces manquantes ». Aux termes de l’article R. 423-39 du même code : « L’envoi prévu à l’article R. 423-38 précise : / a) Que les pièces manquantes doivent être adressées à la mairie dans le délai de trois mois à compter de sa réception ; / b) Qu’à défaut de production de l’ensemble des pièces manquantes dans ce délai, la demande fera l’objet d’une décision tacite de rejet en cas de demande de permis (…) ;/ c) Que le délai d’instruction commencera à courir à compter de la réception des pièces manquantes par la mairie ». Aux termes de l’article R. 423-19 du code de l’urbanisme : « Le délai d'instruction court à compter de la réception en mairie d'un dossier complet ». Aux termes de l’article R. 423-24 du même code : « Le délai d'instruction de droit commun prévu par l'article R. 423-23 est majoré d'un mois : a) lorsque le projet est soumis, dans les conditions mentionnées au chapitre V, à un régime d’autorisation ou à des prescriptions prévues par d’autres législations ou réglementations que le code de l’urbanisme (…) c) Lorsque le projet est situé dans le périmètre d'un site patrimonial remarquable ou dans les abords des monuments historiques ; ».

    3. Il résulte de ces dispositions qu’en l’absence de notification d’une décision expresse de l’administration, d’une demande de pièces complémentaires ou d’une notification de majoration, de prolongation ou de suspension du délai d'instruction, un permis de construire tacite naît à l’issue d’un délai de trois mois suivant le dépôt de la demande, lorsque celle-ci porte sur un immeuble autre qu’une maison individuelle au sens du titre III du livre II du code de la construction et de l'habitation.

    4. En application de ces dispositions, le délai d’instruction n’est ni interrompu, ni modifié par une demande, illégale, tendant à compléter le dossier par une pièce qui n’est pas exigée en application du livre IV de la partie réglementaire du code de l’urbanisme. Dans ce cas, une décision de non-opposition à déclaration préalable ou un permis tacite naît à l’expiration du délai d’instruction, sans qu’une telle demande puisse y faire obstacle.

    5. En l’espèce, la société… a déposé une demande de permis de construire le 30 septembre 2020. Le service instructeur a formulé une demande de pièces complémentaires le 27 octobre 2020, dans le délai prescrit d’un mois, auquel a répondu la société… le 1er décembre 2020, date à laquelle le dossier est réputé complet. Si par ledit courrier du 27 octobre 2020, la commune a opposé au constructeur une prorogation de délai d’un mois en application de l’article R. 423-4 du code de l’urbanisme dont elle ne conteste pas l’illégalité, cette erreur a pour conséquence de rendre inopposable au pétitionnaire le délai d’instruction modifié. Le délai d’instruction étant de trois mois, la société… est fondée à soutenir qu’elle était titulaire d’un permis de construire tacite depuis le 1 er mars 2020 que l’arrêté attaqué a eu pour effet de retirer» (TA de Marseille, 6 février 2023, n° 2103735).

    Focus sur l’arrêt rendu le 4 janvier 2023 par la chambre commerciale de la Cour de cassation, X contre Société Banque CIC Nord-Ouest (pourvoi n° 15-20.177) publié au Bulletin.

    emprunteur averti et non averti

     

    Si la banque est soumise à un devoir de mise en garde envers l’emprunteur et la caution non avertis lors de la conclusion d’un contrat de prêt, cette obligation disparaît lorsque la banque contracte avec un emprunteur dit « averti ».

    Mais qui est « averti » ?

    Au cas d’espèce, afin d’acquérir l’intégralité des parts de la SARL dans laquelle ils exerçaient, quatre salariés ont constitué une société holding. Pour les besoins de cette acquisition, la holding a contracté un prêt avec le CIC, garanti par le cautionnement d’un des anciens salariés devenu gérant de la holding. Par la suite la holding a été placée en redressement judiciaire puis en liquidation judiciaire. La banque a alors naturellement recherché la caution en paiement.

    La caution, également dirigeante de la holding de reprise, conteste la décision rendue par la cour d’appel de Rouen la condamnant au remboursement du prêt, soutenant que la banque avait manqué à son devoir de mise en garde.

    Pour rejeter le pourvoi la Haute juridiction retient la caractère « averti » de la caution.

    En effet, l’emprunteur avait, durant ses cinq ans d’exercice au sein de la SARL en tant que responsable commercial, doublé le chiffre d'affaires de cette dernière « par la mise en place d’une réelle stratégie commerciale et en lui insufflant un nouvel élan. ». En outre, le montage juridique effectué en vue de l’acquisition de la SARL plaidait également en faveur du caractère « averti » de la caution. Attention cependant car la qualité d’emprunteur averti s’apprécie au jour de la signature du contrat de prêt et ne saurait se déduire de la seule qualité de dirigeant ou associé de la société emprunteuse, puisqu’une expérience de la vie des affaires ou une implication dans la gestion de la société emprunteuse demeure requis par la jurisprudence.

    Ainsi, les juges ont considéré que la caution était à même de mesurer le risque d’endettement né de l’octroi du prêt souscrit afin d’acquérir la SARL, dont il connaissait forcément les résultats.

    Par conséquent, la Cour précise ici un peu plus les critères caractérisant la qualité d’emprunteur averti qui fait débat de puis maintenant de nombreuses années, tout en rappelant que la qualité d’emprunteur averti d’une personne morale s’apprécie en la personne de son représentant légal au moment de la conclusion du contrat. 

    Le Conseil constitutionnel, saisi dans le cadre d’une question prioritaire de constitutionalité, a déclaré conforme à la Constitution la procédure instaurant un recours préalable obligatoire contre les avis conformes de l’architecte des bâtiments de France pour les travaux dans le périmètre d’un site patrimonial remarquable ou dans les abords des monuments historiques.

     

    RAPO ABF

     

    Décision n° 2022-1032 QPC du 27 janvier 202

    M. Osman B. [Recours contre l’avis défavorable de l’architecte des Bâtiments de France à l’occasion du refus d’autorisation de certains travaux]

    Le Conseil Constitutionnel, saisi par une QPC transmise par la juridiction administrative, s’est prononcé sur la conformité à la Constitution des dispositions de l’article L. 632-2 du code du patrimoine, le requérant critiquant le fait qu’il n’est nullement précisé, dans le texte, « si le recours administratif prévu contre l’avis négatif de l’architecte des Bâtiments de France doit obligatoirement être exercé préalablement au recours contentieux contre le refus d’autorisation d’urbanisme faisant suite à cet avis. » (§ 3)

    Ce faisant, le requérant critiquait et cherchait en réalité à renverser la jurisprudence constante du Conseil d’Etat en matière de recours préalable obligatoire, laquelle considère qu’une requête en annulation est irrecevable en l’absence d’un pareil recours.

    En effet, et pour rappel – nous renvoyons sur ce point à l’étude consacrée au recours administratif préalable obligatoire élaborée en 2008 par la Section du Rapport et des Etudes du Conseil d’Etat –, une personne soumise à l’obligation de recours administratif préalable n’est, sauf disposition contraire, recevable à présenter un recours contentieux qu’à la condition de l’avoir elle-même formé antérieurement à la saisine du juge administratif (par exemple : CE, Sect., 28 juin 2013, SAS Coutis, n° 355812).

    Le fondement de cette règle jurisprudentielle est assez clair : la décision issue du recours préalable se substituant à la décision initiale, seule celle-ci doit être déférée devant le juge de l’excès de pouvoir.

    Pour stricte qu’elle puisse apparaître, cette règle connaît toutefois des infléchissements.

    Certes, dans l’hypothèse où la substitution entre la décision initiale et la décision rendue sur RAPO est d’ores intervenue avant l’introduction de la requête, les conclusions de celle-ci sont irrecevables (CE, Section, 18 novembre 2005, Houlbreque, n° 270075 ; CE, 8 juillet 2005, Ministre de la Santé, de la famille et des personnes handicapées, n° 264366).

    Toutefois, d’une part, le juge administratif ne s’empêche pas de requalifier d’office les conclusions du requérant, en les regardant comme dirigées contre la décision prise sur recours administratif préalable obligatoire dans l’hypothèse où une décision sur RAPO est intervenue (CE, 19 décembre 2008, Mme Mellinger épouse Praly, n° 297187, A).

    Par ailleurs, « dès lors que le RAPO a été adressé à l'administration préalablement au dépôt de la demande contentieuse, la circonstance que cette dernière demande ait été présentée de façon prématurée, avant que l'autorité administrative ait statué sur le recours administratif, ne permet pas au juge administratif de la rejeter comme irrecevable si, à la date à laquelle il statue, est intervenue une décision, expresse ou implicite, se prononçant sur le recours administratif. » (CE, 16 juin 2021, n° 440064).

    En ce qui concerne plus précisément les dispositions de l’article L. 632-2 du code du patrimoine, leur incidence sur les autorisations d’urbanisme résulte des articles R. 423-54[1] et R. 424-14 du code de l’urbanisme.

    Ce dernier article dispose en effet :

    « Lorsque le projet est situé dans le périmètre d’un site patrimonial remarquable ou dans les abords des monuments historiques, le demandeur peut, en cas d’opposition à une déclaration préalable ou de refus de permis fondé sur un refus d’accord de l’architecte des Bâtiments de France, saisir le préfet de région, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, d’un recours contre cette décision dans le délai de deux mois à compter de la notification de l’opposition ou du refus.

    Le préfet de région adresse notification de la demande dont il est saisi au maire s’il n’est pas l’autorité compétente, et à l’autorité compétente en matière d’autorisations d’urbanisme.

    Le délai à l’issue duquel le préfet de région est réputé avoir confirmé la décision de l’autorité compétente en cas de recours du demandeur est de deux mois.

    Si le préfet de région infirme le refus d’accord de l’architecte des Bâtiments de France, l’autorité compétente en matière d’autorisations d’urbanisme statue à nouveau dans le délai d’un mois suivant la réception de la décision du préfet de région. »

    Il résulte de ces dispositions que, quels que soient les moyens sur lesquels son recours est fondé, un pétitionnaire n’est pas recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre la décision de refus d’une autorisation d’urbanisme portant sur un immeuble situé dans le périmètre d’un site patrimonial remarquable ou dans les abords des monuments historiques, faisant suite à un avis négatif de l’architecte des Bâtiments de France, s’il n’a pas, préalablement, saisi le préfet de région, selon la procédure spécifique définie à l’article R. 424-14 du code de l’urbanisme.

    Un requérant qui saisit directement le juge administratif peut se voir opposer l’irrecevabilité de sa demande faute d’avoir exercé préalablement un recours préalable obligatoire, quand bien il ne lui aurait pas été indiqué qu’il devait au préalable saisir l’administration, (voir sur ce point, s’agissant d’une décision de l’ABF : CE, 28 mai 2010, Dufour, n° 327615, fiché B).

    En l’espèce, le Conseil constitutionnel n’a pas remis en cause ce corpus juridique bien établi par le juge administratif, écartant les deux moyens soulevés par le demandeur.

    Fut tout d’abord écarté le moyen tiré de l’incompétence négative du législateur, au motif les dispositions de la procédure à suivre devant les juridictions administratives relevaient de la compétence réglementaire au sens des articles 34 et 37 de la Constitution.

    Elément intéressant, le Conseil constitutionnel a précisé que, l’instauration d’un recours préalable obligatoire ne remettant pas en cause le droit des administrés d’agir en justice, pareille exigence ne portait pas atteinte au droit à un recours effectif tel qu'il résulte de l'article 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789.

    Quant au moyen tiré de la méconnaissance de l’objectif d’intelligibilité et de clarté de la loi, celui-ci fut implicitement écarté.

    Ce recours préalable obligatoire est ainsi préservé.

     

    [1] « Lorsque le projet est situé dans le périmètre d’un site patrimonial remarquable ou dans les abords des monuments historiques, l’autorité compétente recueille l’accord de l’architecte des Bâtiments de France. […] »

    Une association peut contester un permis de construire tenant lieu d’autorisation d’exploitation commerciale à la fois en tant qu’il vaut autorisation de construire et en tant qu’il vaut autorisation d’exploitation commerciale, pour autant qu’elle justifie d’un intérêt pour agir contre chacune de ces autorisations.

    intérêt à agir associations

     

    L’article L. 600-1-4 du code de l’urbanisme dispose :

    « Lorsqu'il est saisi par une personne mentionnée à l'article L. 752-17 du code de commerce d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre le permis de construire mentionné à l'article L. 425-4 du présent code, le juge administratif ne peut être saisi de conclusions tendant à l'annulation de ce permis qu'en tant qu'il tient lieu d'autorisation d'exploitation commerciale. Les moyens relatifs à la régularité de ce permis en tant qu'il vaut autorisation de construire sont irrecevables à l'appui de telles conclusions.

    Lorsqu'il est saisi par une personne mentionnée à l'article L. 600-1-2 d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre le permis de construire mentionné à l'article L. 425-4, le juge administratif ne peut être saisi de conclusions tendant à l'annulation de ce permis qu'en tant qu'il vaut autorisation de construire. Les moyens relatifs à la régularité de ce permis en tant qu'il tient lieu d'autorisation d'exploitation commerciale sont irrecevables à l'appui de telles conclusions ».

    Ces dispositions ne remettent pas en cause les modalités classiques de l’intérêt à agir des associations, rappelle le Conseil d’Etat dans un arrêt du 30 décembre 2022, censurant les premiers juges pour erreur de droit :

    « 3. Ces dispositions ne font pas obstacle à ce qu'une association puisse contester un permis de construire tenant lieu d'autorisation d'exploitation commerciale à la fois en tant qu'il vaut autorisation de construire et en tant qu'il vaut autorisation d'exploitation commerciale, pour autant qu'elle justifie d'un intérêt pour agir contre chacune de ces autorisations. Dès lors, il appartenait à la cour administrative d'appel de Marseille, pour déterminer la recevabilité des conclusions présentées par l'association En toute franchise département du Var contre le permis litigieux en tant qu'il valait autorisation de construire, lesquelles étaient présentées en même temps que des conclusions dirigées contre le même permis en tant qu'il tenait lieu d'autorisation d'exploitation commerciale, de rechercher si elle justifiait, au regard de l'objet défini par ses statuts et de son champ d'action géographique, d'un intérêt lui donnant qualité pour agir contre chacune de ces autorisations.

    4. Il ressort des énonciations de l’arrêt attaqué que, pour écarter les moyens tirés de la méconnaissance des règles définies par le code de l’urbanisme présentés à l’encontre du permis délivré par l’arrêté du 8 juillet 2020 en tant qu’il vaut autorisation de construire, la cour administrative d’appel de Marseille a relevé que l’association requérante avait pour objet principal la défense des intérêts collectifs de la profession de commerçant indépendant et d’artisan dans le département du Var alors même que ses statuts mentionnent également la défense et la préservation du cadre de vie contre toute atteinte qui y serait portée par la planification ou l’autorisation de surfaces destinées au commerce et en a déduit que c’est en application des dispositions de l’article L. 752-17 du code de commerce, et non en application des dispositions de l’article L. 600-1-2 du code de l’urbanisme, qu’elle disposait d’un intérêt lui donnant qualité pour agir contre le permis de construire attaqué. Il résulte de ce qui a été dit au point précédent qu’en statuant ainsi, la cour a commis une erreur de droit» (CE, 30 décembre 2022, n° 456413).

    Le « considérant » de principe ci-dessus a été posé pour la première fois dans un arrêt du 7 octobre 2022, où les premiers juges ont été censurés pour dénaturation des pièces du dossier, tout commee dans un autre arrêt du 26 décembre 2022 :

    « 4. Il ressort des énonciations de l’arrêt attaqué que, pour écarter comme irrecevables ses conclusions dirigées contre le permis délivré par l’arrêté du 29 avril 2019 et le permis modificatif délivré par l’arrêté du 3 décembre 2020 en tant qu’ils valent autorisations de construire, la cour administrative d’appel de Marseille a relevé que l’association requérante avait pour objet la défense des intérêts collectifs des commerçants, indépendants et artisans dans le département de l’Hérault et en a déduit que, les autorisations de construire ne portant, par elles-mêmes, pas atteinte au commerce, ses statuts ne lui donnaient intérêt pour agir contre un permis de construire qu’en tant qu’il vaut autorisation d’exploitation commerciale. En statuant ainsi, sans tenir compte des autres finalités poursuivies par l’association et retracées à l’article 2 de ses statuts mis au dossier du juge du fond, notamment « la défense et la préservation du cadre de vie contre toute atteinte qui y serait portée par la planification ou l’autorisation de surfaces destinées au commerce », la cour a dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis. Dès lors, l’arrêt doit être annulé en tant qu’il juge irrecevables les conclusions de l’association dirigées contre les arrêtés des 29 avril 2019 et 3 décembre 2020 en tant qu’ils valent autorisations de construire » (CE, 7 octobre 2022, n° 452959).

    « 4. Il ressort des énonciations de l’arrêt attaqué que, pour écarter comme irrecevables ses conclusions dirigées contre le permis délivré par l’arrêté du 18 décembre 2018 en tant qu’il vaut autorisation de construire, la cour administrative d’appel de Marseille a relevé que l’association requérante avait pour objet la défense des intérêts collectifs des commerçants, indépendants et artisans dans le département du Var et en a déduit que, les autorisations de construire ne portant, par elles-mêmes, pas atteinte au commerce, ses statuts ne lui donnaient intérêt pour agir contre un permis de construire qu’en tant qu’il vaut autorisation d’exploitation commerciale. En statuant ainsi, sans tenir compte des autres finalités poursuivies par l’association retracées à l'article 2 de ses statuts et figurant dans les pièces du dossier soumis aux juges du fond, notamment « la défense et la préservation du cadre de vie contre toute atteinte qui y serait portée par la planification ou l’autorisation de surfaces destinées au commerce », la cour a dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis. Dès lors, l’arrêt doit être annulé en tant qu’il juge irrecevables les conclusions de l’association dirigées contre l’arrêté du 18 décembre 2018 en tant qu’il vaut autorisation de construire » (CE, 26 décembre 2022, n° 442811).

    Ainsi, conformément au droit associatif, le Conseil d’Etat confirme la possibilité pour une association de posséder plusieurs facettes, sans que les membres poursuivant l’un ou l’autre de ses buts ne soient tenus de constituer une association distincte.

    En l’occurrence, la construction d'ensembles commerciaux a suscité un regain associatif de la part d’habitants soucieux de placer le cadre de vie à l’abri de tels ensembles. Il est donc apparu normal que les associations en cause se dotent de deux facettes (urbanistique et commerciale), à l’instar du permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale, qui réunit deux autorisations : celle de construire et celle d’exploiter.

    En dehors des cas où le projet serait de nature à affecter par elles-mêmes les conditions d'exploitation de son établissement, le professionnel dont l'activité, exercée dans les limites de la zone de chalandise définie pour chaque projet, est susceptible d'être affectée par le projet, reste quant à lui cantonné à la contestation de l’autorisation d’exploitation commerciale, conformément à la jurisprudence classique du Conseil d’Etat et, en dernier lieu, aux dispositions de l’article L. 600-1-4 du code de l’urbanisme.

     

     Un décret n° 2023-10 du 9 janvier 2023 vient étendre aux tribunaux administratifs et aux cours administratives d’appel les séances et audiences d’instructions expérimentées devant le Conseil d’Etat.

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    « la procédure étant essentiellement écrite, vous n’êtes pas tenu d’assister à l’audience. Si vous y assistez, vous pourrez présenter des observations orales » : c’est en ces termes que les avis d’audience devant les tribunaux administratifs et cours administratives d’appel rappellent le caractère facultatif de la présence à l’audience et mentionnent la possibilité d’y présenter des observations orales.

    Devant le Conseil d’Etat, l’avis d’audience rappelle l’impossibilité de présenter des observations autrement que par l’intermédiaire un avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de Cassation : « En vertu des dispositions combinées des articles R. 432-1, R. 613-5 et R. 733-1 du code de justice administrative, seuls les avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de Cassation peuvent présenter des observations orales le jour de la séance de jugement ».

    Toutefois, lorsque la juridiction souhaite recueillir des observations orales, elle va désormais pouvoir le faire de manière plus souple au cours de l’instruction.

    En effet, le décret n° 2020-1404 du 18 novembre 2020 a introduit devant le Conseil d’Etat, à titre expérimental, la possibilité, par une séance orale d’instruction ou une audience publique d’instruction, d’entendre les parties sur toute question de fait ou de droit dont l'examen paraît utile.

    Un bilan positif de cette expérimentation a été tiré :

    « Le bilan fait ressortir des points positifs :

    Une souplesse du dispositif (contrairement au formalisme de l’enquête R623-1 CJA)

    Un accès direct à des sources d’information

    La possibilité de centrer les débats sur les questions essentielles

    L’ouverture du juge vers les parties

    Une plus grande acceptabilité des décisions rendues

    Le rapport enfin préconise sa pérennisation au CE et son extension aux TA/CAA. Cela ne se substitue pas à l’instruction écrite mais vient en complément et doit demeurer à la main de la collégialité (sauf JU) et non déléguée au seul rapporteur de l’affaire. Cette procédure ne doit pas empêcher la formalisation a posteriori d’écritures dans le dossier » (compte-rendu du Conseil supérieur des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel du 7 décembre 2022 fait par l’Union Syndicale des Magistrats Administratifs).

    « Le bilan fait par le comité d’évaluation de cette expérience conduit à estimer que, si ces dispositions ne peuvent évidemment se substituer au caractère fondamentalement écrit de la procédure contentieuse, elles présentent un intérêt particulier dans le cas où se posent des questions factuelles précises pour lesquelles un complément d’information, selon des formes plus souples que la production de mémoires écrits ou que les moyens d’investigation déjà prévus par le code de justice administrative, s’avère nécessaire » (compte-rendu du Conseil supérieur des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel du 7 décembre 2022 fait par le Syndicat de la juridiction administrative).

    Le décret n° 2023-10 du 9 janvier 2023 modifie donc le code de justice administrative pour étendre cette possibilité aux tribunaux administratifs et cours administratives d’appel :

    « Le chapitre V du titre II du livre VI du même code est remplacé par les dispositions suivantes :

    « Chapitre V

    « Les procédures orales d'instruction

    « Art. R. 625-1. - En complément de l'instruction écrite, la formation de jugement dans un tribunal ou une cour, ou la formation chargée de l'instruction au Conseil d'Etat, peut tenir une séance orale d'instruction au cours de laquelle elle entend les parties sur toute question de fait ou de droit dont l'examen paraît utile.

    « Les parties sont convoquées par un courrier qui fait état des questions susceptibles d'être évoquées. Toute autre question peut être évoquée au cours de cette séance.

    « Peut également être convoquée toute personne dont l'audition paraît utile.

    « Art. R. 625-2. - La formation de jugement peut tenir une audience publique d'instruction au cours de laquelle les parties sont entendues sur toute question de fait ou de droit dont l'examen paraît utile. Cette audience ne peut se tenir moins d'une semaine avant la séance de jugement au rôle de laquelle l'affaire doit être inscrite.

    « Le président de la formation de jugement convoque les parties par un courrier qui fait état des questions susceptibles d'être évoquées. Peut également être convoquée toute personne dont l'audition paraît utile.

    « Les parties ou, si elles sont représentées, leurs représentants peuvent présenter des observations orales à l'audience d'instruction. » ».

    Soit un dispositif permettant d’éprouver et de sonder les parties, en vue d'éclairer la religion du tribunal. 

     

     

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    L’illégalité de l’autorisation de lotir ne peut être utilement invoquée par voie d'exception à l'appui de conclusions dirigées contre l'autorisation d'occupation des sols.

    L'illégalité d'une décision individuelle devenue définitive peut être néanmoins être invoquée par voie d’exception à l’occasion d’un recours contre un acte ultérieur, à condition de former, avec ce dernier acte, une même opération complexe

    « L'illégalité d'un acte administratif, qu'il soit ou non réglementaire, ne peut être utilement invoquée par voie d'exception à l'appui de conclusions dirigées contre une décision administrative ultérieure que si cette dernière décision a été prise pour l'application du premier acte ou s'il en constitue la base légale. S'agissant d'un acte réglementaire, une telle exception peut être formée à toute époque, même après l'expiration du délai du recours contentieux contre cet acte. S'agissant d'un acte non réglementaire, l'exception n'est, en revanche, recevable que si l'acte n'est pas devenu définitif à la date à laquelle elle est invoquée, sauf dans le cas où l'acte et la décision ultérieure constituant les éléments d'une même opération complexe, l'illégalité dont l'acte serait entaché peut être invoquée en dépit du caractère définitif de cet acte » (CE, avis, 30 décembre 2013, n° 367615 ; CE, 17 décembre 1982, n° 355554).

    Tel est par exemple le cas d’une autorisation de défrichement, dont la légalité peut être contestée dans le cadre d’un recours contre un permis de construire portant sur des travaux nécessitant une telle autorisation (CE, 15 octobre 2004, n° 227506 ; CAA de Bordeaux, 21 février 2008, n° 05BX02164).

    Tel n’est en revanche pas le cas d’une autorisation de lotir, a jugé le Conseil d’Etat dans un arrêt rendu le 22 décembre 2022 :

    « 4. Une autorisation d'occupation des sols délivrée sur l'un des lots issus d'une division foncière ayant donné lieu à une autorisation de lotir n'est pas prise pour l'application de la décision par laquelle l'administration a délivré l'autorisation de lotir, cette dernière ne constituant pas non plus la base légale de la première. Par suite, l'illégalité de la décision d'autorisation de lotir ne peut être utilement invoquée par voie d'exception à l'appui de conclusions dirigées contre l'autorisation d'occupation des sols.

    1. 5. Pour suspendre l'exécution des permis litigieux, le juge des référés du tribunal administratif a retenu qu'était propre à créer un doute sérieux quant à leur légalité le moyen tiré, par la voie de l'exception, de ce que le maire de Bonneville-sur-Touques aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en prenant un arrêté de non-opposition à déclaration préalable de division foncière pour un projet de construction de nature à compromettre l'exécution du futur plan local d'urbanisme intercommunal. Il résulte de ce qui a été dit au point précédant qu'en retenant cette exception comme étant propre à créer un doute sérieux quant à la légalité des permis de construire en litige, le juge des référés du tribunal administratif de Caen a commis une erreur de droit» (CE, 22 décembre 2022, n° 458524).

    Ainsi, l’illégalité du permis d’aménager un lotissement ou de la décision de non-opposition à la déclaration préalable d’un lotissement devenu définitif(ve) ne peut être invoquée dans le cadre d’un recours contre un permis de construire ou d’une décision de non-opposition à une déclaration préalable de travaux accordé(e) dans le périmètre de ce lotissement.

    Cela étant, l’exception d’illégalité d’un acte individuel, dans les autres cas où elle est possible, reste enfermée dans un délai d’un an, sauf circonstances ou délai particuliers (CE, 27 février 2019, n° 418950).

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    Focus sur l’arrêt rendu le 14 décembre 2022 par la 3e chambre de la Cour de cassation (Pourvoi n° 21-20.885)

    Voilà une décision qui, certainement, soulagera aussi bien les juridictions civiles, en proie à un véritable engorgement depuis l’arrêt rendu par la 3ème chambre civile de la Cour de cassation le 16 janvier 2020 (n°18-25.915), que les praticiens du droit de la construction.

    Pour mémoire, dans cet arrêt, la Cour de cassation avait jugé que « le délai de la prescription de ce recours et son point de départ ne relèvent pas des dispositions de l’article 1792-4-3 du code civil [puisque] ce texte, créé par la loi du 17 juin 2008 et figurant dans une section du code civil relative aux devis et marchés et insérée dans un chapitre consacré aux contrats de louage d’ouvrage et d’industrie, n’a vocation à s’appliquer qu’aux actions en responsabilité dirigées par le maître de l’ouvrage contre les constructeurs ou leurs sous-traitants ».

     Il en résultait que  le délai de prescription du recours d’un constructeur contre un autre constructeur commençait à courir à compter du jour où le premier a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.

    La solution dégagée par la Cour de cassation dans son arrêt précité du 16 janvier 2020 obligeait les constructeurs assignés en référé-expertise avant procès à introduire un recours en garantie contre les autres intervenants dans le but d’interrompre la prescription, alors même qu’ils n’avaient pas été assignés en paiement par le maître ou l’acquéreur de l’ouvrage.

    Cette jurisprudence vivement critiquée par une partie de la doctrine et des praticiens du droit de la construction vient de connaître un véritable revirement.

    La Cour de cassation, reconnaissant que « la multiplication de ces recours préventifs, qui nuit à une bonne administratif de la justice » a expressément décidé de modifier sa jurisprudence.

    Désormais, l’assignation ne constituera le point de départ du délai de prescription de l’action du constructeur tendant à être garanti des condamnations que si elle est accompagnée d’une demande de reconnaissance d’un droit, ne serait-ce que par provision.

    Si l’on peut se réjouir d’une telle avancée, il reste à garder à l’esprit que l’assignation en référé-provision, dès lors qu’elle constitue une demande de reconnaissance d’un droit demeure soumise à l’ancienne jurisprudence rendue par la Cour de cassation le 16 janvier 2020 (n°18-25.915).

    Nous avons le plaisir de vous inviter à notre workshop sur la caution personnelle du dirigeant, organisé par #60000rebonds et animé par Céline HUMBERT et Jean-Pierre MELANI.

    Vous pouvez adresser vos demandes d'inscription à l'adresse: https://my.weezevent.com/atelier-caution-personnelle 

    Au plaisir de vous y rencontrer !

    invitation workshop caution personnelle Aubagne 7 décembre 2022 4

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    Crédit dessin: Michel Szlazak

    La loi d'orientation des mobilités n° 2019-1428 du 24 décembre 2019 a modifié l’article 24-5 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis en y intégrant l’obligation pour les syndics d’inscrire à l’ordre du jour de l'assemblée générale des copropriétaires avant le 1er janvier 2023 la question de la réalisation d'une étude portant sur l'adéquation des installations électriques existantes aux équipements de recharge et, le cas échéant, les travaux à réaliser à cet effet (article 24-5 III).

    La décision de faire réaliser cette étude de faisabilité devra être approuvée par l’assemblée générale à la majorité des voix exprimées des copropriétaires présents, représentés ou ayant voté par correspondance (article 24 II i).

    L’objectif est de permettre aux copropriétaires de faire la lumière sur les capacités des installations électriques existantes de leur immeuble et les travaux plus ou moins importants que nécessitera la mise en place d’équipements de recharge.

    Voilà qui devrait compléter les bonnes résolutions pour 2023…

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    Crédit dessin: Michel Szlazak

    La Cour de cassation, chambre commerciale le 29 juin 2022 n°20-11.952 et 20-13.228 a jugé que les agents commerciaux s’abstenant d’informer leur mandant d’un changement de direction ou d’actionnariat manquent à leur obligation de loyauté. Ce faisant ils commettent une faute grave justifiant la résiliation du contrat sans indemnité.

    Rappelons que l’article L134-12 du Code de commerce prévoit que « en cas de cessation de ses relations avec le mandant, l’agent commercial a droit à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi. ». Cette indemnité n’est écartée que dans les cas limitativement énumérés par l’article L134-13 parmi lesquels figure la faute grave de l’agent commercial. On peut citer à titre d’exemple l’exercice d’une activité parallèle de l’agent même en l’absence de clause d’exclusivité, le désintérêt pour la vente des produits du mandant qui constituent des cas de faute grave.

    Dans ces deux arrêts, une clause contractuelle avait été stipulée dans les contrats et prévoyait un agrément par le mandant en cas de changement de direction ou d’actionnariat. Le mandant ayant été informé tardivement voire pas du tout pour le premier arrêt, les contrats furent résiliés pour faute grave.

    La Cour de cassation interrogée sur la validité de telle clause dans le contrat d’agent commercial, contourne la question et préfère invoquer le manquement à l’obligation de loyauté pour caractériser la faute grave. L’agent doit donc être loyal à son mandant clause d’intuitu personae ou non.

    La Cour de cassation par le raisonnement adoptée confère ainsi une pleine efficacité aux clauses d’intuitu personae et d’agrément, en privant l’agent commercial de son indemnité de fin de contrat en cas de violation.

    Cependant ce stratagème permet à la Cour de cassation de maintenir un flou juridique quant à la possibilité de contractualiser la faute grave. Les dispositions de l’article L134-12 étant d’ordre public, il n’est pas possible de les écarter mais peut-on qualifier contractuellement tel ou tel comportement de faute grave ? Rien n’est moins sûr. La Cour de cassation considère que c’est le manquement à l’obligation de loyauté qui constitue une faute grave, et pas la violation directement desdites clauses. C’est parce que l’agent commercial n’a pas informé son mandant de son changement d’actionnariat, qu’il a manqué à son obligation de loyauté. Ce manquement constituant une faute grave justifiant la perte de son indemnité de fin de contrat.

    Le praticien devra donc être prudent s’il décide par avance de définir contractuellement la faute grave. L’agent commercial, lui, devra garder à l’esprit qu’il est débiteur d’une obligation de loyauté envers son mandant, et que tous les changements importants de sa situation devront être communiqués à son mandant.

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    Crédit dessin: Michel Szlazak

    Par trois arrêts rendus le 30 juin 2022, la troisième chambre civile de la Cour de cassation a mis fin à l’incertitude qui entourait le paiement des loyers des baux commerciaux pendant la période de la crise sanitaire.

    Elle affirme avec force que le bailleur ne manque pas à son obligation de délivrance et que le preneur ne peut se prévaloir de la force majeure pour échapper à ses obligations pécuniaires pendant la période du covid 19.

    Elle souligne que les restrictions résultant des mesures législatives et réglementaires prises dans le cadre de la crise sanitaire ne sont pas imputables au bailleur et n’emportent pas perte de la chose que le bailleur ne manque pas à son obligation de délivrance si l’impossibilité d’exploiter résulte d’une mesure générale de police administrative. Dès lors, le mécanisme de l’exception d’inexécution fréquemment invoqué par les preneurs est inopérant.

    Cette solution est dans la droite ligne de sa jurisprudence, puisque si la Cour de cassation entend largement la notion de délivrance, son utilisation permet de mettre à la charge du bailleur les travaux rendus nécessaires à l’affectation du local prévue au contrat. Or, la fermeture des commerces dits non-essentiels par décision gouvernementale ne relève pas de l’état de l’immeuble, ni d’ailleurs de la volonté du bailleur, et ce dernier n’a aucune prise dessus.

    Enfin, elle clarifie l’utilisation de la force majeure invoquée par les preneurs. Ici, il ne s’agissait pas pour le preneur de prétendre avoir été empêché de payer le loyer, mais plutôt d’en être dispensé car il avait été empêché de jouir du local. Cela revenait, par un moyen détourné à atteindre le même résultat que celui qui aurait pu être obtenu avec l’exception d’inexécution. La Cour de cassation rejette le raisonnement.

    Ces différentes solutions sont certainement motivées par les dispositifs d’aide mis en place par l’état au bénéfice des commerces. D’ailleurs les différents avis rendus par l’avocat général, contextualisent de manière assez précise les effets des différentes mesures sur l’activité du commerce et la part du loyer dans les charges des commerçants. La solution, aurait pu être différente si le dispositif des aides n’avait pas été aussi efficace.

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    Crédit dessin: Michel Szlazak

    L’avant-projet de réforme du droit des contrats spéciaux a été élaboré par une Commission de huit membres regroupant avocat, professeurs et un conseiller Doyen de la troisième chambre civile de la Cour de cassation avec l’aide de magistrats.

    La volonté de clarifier, de simplifier et de moderniser les règles relatives aux contrats spéciaux ont été les moteurs de cette réforme.

    Les rédacteurs de l’avant-projet ont souhaité travailler sur plusieurs axes afin de réformer les contrats spéciaux.

    Ainsi, l’accent a été porté sur la liberté contractuelle, le souci de construire le droit « à partir de phénomènes du réel, d’avancer du concret vers l’abstrait plutôt que l’inverse », sur la praticité.

    Enfin, la commission a indiqué avoir cherché faire œuvre de sagesse dans la rédaction de l’avant-projet.

    Par conséquent, chaque projet de contrat a été préparé par plusieurs personnes et a pu faire l’objet d’un vote lorsque des débats émergeaient.

    En juillet 2022, l’ensemble de l’avant-projet sera présenté article par article.

    Pour lors, l’avant-projet a été présenté s’agissant du contrat de vente, de bail, de prêt, de dépôt et du contrat d’entreprise.

    Notre examen va se concentrer sur l’avant-projet de réforme du contrat de bail.

    En effet, les règles et les distinctions relatives aux contrats de louage sont particulières vieillissantes. Le code civil distingue aujourd’hui les « baux à loyer », des « baux à ferme », du « bail à cheptel » etc.

    Certains des articles actuels n’ont vocation à s’appliquer que de manière résiduelle.

    Les articles 1713 et 1714 du Code civil rappellent le principe de consensualisme du contrat de location ainsi que l’exigence d’un loyer.

    L’objet du contrat de location pourrait désormais être largement étendu. En effet, l’article 1712 du Code civil modifié par la réforme disposerait :

    « On peut louer toutes sortes de choses qui sont dans le commerce, mobilières ou immobilières, corporelles ou incorporelles, sous réserve des dispositions particulières s’y appliquant.

    Lorsque la location porte sur une chose incorporelle, et que les parties ont manqué à y adapter les modalités d’exécution du contrat, notamment quant à la délivrance, l’usage et la restitution, les règles du présent titre s’appliquent autant qu’elles sont compatibles avec la nature de la chose louée ».

    La section 2 « Des effets de la location » prévue par l’avant-projet de réforme est divisée en trois sous-sections comprenant les obligations du bailleur, les obligations du locataire ainsi que des règles relatives à la cession de contrat, sous-location et cession de la chose.

    L’article 1719 du Code civil prévu par l’avant-projet de réforme précise que : « le bailleur est tenu d’exprimer clairement ce qui se rapporte aux qualités et aux caractéristiques de la chose qu’il loue. Dans cette mesure, les obscurités et ambiguïtés du contrat s’interprètent contre lui ».

    Par ailleurs, l’alinéa 2 de l’article 1722 du Code civil dispose « L’état du bien loué est dressé contradictoirement et par écrit. A défaut, le bien est présumé avoir été délivré en bon état apparent ».

    L’obligation d’établir l’état des lieux est désormais textuellement prévu au sein du Code tout comme la description de l’objet du bail afin de clarifier les relations entre bailleur et locataire.

    L’entretien de l’objet loué est textuellement prévu par l’article 1730 du Code civil qui dispose « Le locataire est tenu, dans les conditions ci-après :

    1° De payer le loyer ;

    2° D’entretenir la chose et ne pas en jouir autrement que de raison ;

    3° De restituer la chose en fin de contrat.

    S’il manque à prendre possession de la chose louée dans un délai raisonnable, le bailleur peut, après mise en demeure, résilier unilatéralement le bail. Le tout sauf clause contraire. »

    La sous-section trois ayant trait à la cession du contrat, à la sous-location et à la cession de la chose n’a pas fait l’objet d’un consensus par les membres de la commission de sorte qu’il subsiste une option concernant l’article 1737 du Code civil.

    En effet, la proposition majoritaire prévoit que : « Le bailleur dispose d’une action directe en paiement contre le sous-locataire, dans la double limite des loyers et sous-loyers dus.

    La sous-location convenue en violation du bail est inopposable au bailleur ».

    Tandis que l’option envisagée prévoit que le bailleur peut exercer toute action née du contrat de sous-location contre le sous-locataire dans la limite des droits qu’il détient contre le locataire principal.

    Réciproquement, l’option permet au sous-locataire d’exercer contre le bailleur toute action née du contrat de location, dans la double limite des obligations assumées par le bailleur en vertu du contrat et des droits que le sous-locataire tient du contrat de sous-location.

    Ainsi, l’option permettrait tant au sous-locataire qu’au bailleur de se prévaloir de toutes actions et non pas uniquement d’une action directe en paiement à l’initiative du bailleur.

    Enfin, un chapitre est dédié aux dispositions propres aux locations d’immeubles (articles 1749 et suivants du Code civil).

    Ces dispositions permettent précisions sur le sort particulier des baux immobiliers.

    Des dispositions portent le sort du bail d’époux ou de partenaires d’un pacte civil de solidarité, notamment en cas de divorce, de dissolution du pacte et en cas de décès.

    L’avant-projet de réforme des contrats spéciaux semble pertinent et nécessaire en ce qu’il permet d’insuffler modernité et clarté dans l’ensemble des dispositions. 

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    Crédit dessin: Michel Szlazak

    Une société présidente de SAS peut obtenir des dommages-intérêts si sa révocation a été brutale. C’est ce qu’a confirmé la Chambre commerciale de la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 30 mars 2022 (n°19-25.794).

    Dans les faits, une SARL, représentée par son gérant, également associé unique, est Présidente d’une Société par Actions Simplifiées (SAS).

    L’assemblée générale extraordinaire de cette société a décidé la révocation de la SARL de ses fonctions de Présidente dans des circonstances soudaines. La SARL conteste la régularité de sa révocation, estimant que cette dernière a été brutale et vexatoire et demande réparation de son préjudice moral.

    La Cour d’appel de Versailles, dans un arrêt du 17 octobre 2019, reconnaît la déloyauté de la société eu égard aux circonstances brutales de la révocation. Ainsi, elle indemnise à ce titre en réparation du préjudice moral subi le seul gérant, personne physique, représentant la SARL mais non la SARL elle-même, considérant que cette dernière ne démontre pas l’existence d’un préjudice propre.

    La SARL et son gérant se pourvoient en cassation. Ils font grief à l'arrêt de limiter la condamnation de la SAS à payer au gérant la seule somme de 3 000 euros, alors « qu'une société est en droit d'obtenir réparation du préjudice moral qu'elle subit ».

    Les juges de cassation ont dû se prononcer sur la question de savoir si la personne morale dirigeante d’un organe de la société pouvait obtenir réparation de son préjudice moral du fait de la brutalité de sa révocation.

    La Cour de cassation casse l’arrêt d’appel ; dès lors que la Cour d’appel avait constaté que la société n’avait pas respecté son obligation de loyauté et donc considéré que la révocation s’était faite dans des circonstances brutales et vexatoires, elle ne pouvait pas lui refuser l’octroi de dommages et intérêts en guise de réparation de son préjudice moral.

    Ainsi, des dommages-intérêts auraient dû être attribués à la SARL en réparation de son préjudice moral.

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