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    Droit des Affaires

    Droit des Affaires

    Dessin 12.11.2021

    Crédit dessin: Michel Szlazak

    Par deux arrêts en date du 13 octobre 2021, la Cour de cassation a aligné sa position sur celle de la Cour de justice de l’Union Européenne, en considérant que le simple dépôt d’une marque ne pouvait constituer à lui seul un acte de contrefaçon. Il y aura lieu désormais de vérifier l’existence d’autres critères tels que l’usage dans la vie des affaires, pour des produits ou services similaires à celui qui se plaint de la contrefaçon, ou encore le risque de confusion dans l’esprit du public.

    La contrefaçon est définie par l’institut national de la propriété industrielle comme la reproduction, l’imitation ou l’utilisation totale ou partielle d’un droit de propriété intellectuelle sans l’autorisation de son propriétaire.

    La contrefaçon peut toucher indifféremment une marque, un modèle, un brevet, un droit d’auteur, un logiciel, un circuit intégré ou une obtention végétale.

    S’agissant des marques, la jurisprudence interne était jusqu’à présent hésitante quant à la question de savoir si le simple dépôt d’une marque reproduisant une marque antérieure, sans usage effectif dans le monde des affaires, était de nature à constituer un acte de contrefaçon[1].

    La Cour de cassation avait jusqu’à présent une interprétation des articles L713-2, L713-3 et L716-1 du Code de la propriété intellectuelle dans leur rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n°2019-1169 du 13 novembre 2019, lui permettant de considérer que le simple fait de déposer une marque identique ou similaire à une marque antérieure était susceptible de constituer un acte de contrefaçon.

    En effet, le dépôt de la marque contrefaisante était perçu comme une atteinte au droit exclusif du titulaire de la marque antérieure causant nécessairement un dommage. [2]

    Toutefois, par deux arrêts en date du 13 octobre 2021, la Cour de cassation a changé de position et a considéré que le seul dépôt d’une marque ne pouvait constituer un acte de contrefaçon.

    Ce revirement s’explique au regard des jurisprudences rendues par la Cour de justice de l’Union européenne qu’elle cite par ailleurs dans les deux arrêts susmentionnés.

    En effet, la Cour de justice de l’Union européenne a jugé que « le titulaire d’une marque enregistrée ne peut interdire l’usage par un tiers d’un signe similaire à sa marque que si cet usage a lieu dans la vie des affaires, est fait sans le consentement du titulaire de la marque, est fait pour des produits ou des services identiques ou similaires à ceux pour lesquels la marque a été enregistrée et, en raison de l’existence d’un risque de confusion dans l’esprit du public, porte atteinte ou est susceptible de porter atteinte à la fonction essentielle de la marque qui est de garantir aux consommateurs la provenance du produit ou du service »[3].

    La Cour de cassation considère ainsi désormais qu’une demande d’enregistrement d’un signe en tant que marque, même lorsqu’elle est accueillie, ne caractérise pas un usage pour des produits ou des services au sens de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne, en l’absence de tout début de commercialisation de produits ou services sous le signe.

    De même, la Cour indique qu’en pareil cas, aucun risque de confusion dans l’esprit du public et, par conséquent, aucune atteinte à la fonction essentielle d’indication d’origine de la marque, ne sont susceptibles de se produire.

    La Cour de cassation affirme désormais clairement que « la demande d’enregistrement d’un signe en tant que marque ne constitue pas un acte de contrefaçon » et que le moyen qui postule le contraire n’est pas fondé.

    A présent, il sera nécessaire de tenir compte des différents critères dégagés par la Cour de justice de l’Union européenne afin de déterminer si le dépôt de marque est ou non constitutif d’une contrefaçon.

    Les deux décisions du 13 octobre 2021 permettent une harmonisation des jurisprudences internes sur ce sujet à l’origine de vifs débats.

     

    [1] TGI de Paris, 3ème chambre, 22 septembre 2017 n°2016/04325 et en sens contraire v. TGI de Paris, 3ème chambre, 19 octobre 2017 n°2016/00937

    [2] Com. 24 mai 2016 n°14-17.533

    [3] CJUE 3 mars 2016, Daimler, aff. C-179/15, points 26 et 27

    Michilus AH2142B secret web

    Crédit dessin: Michel Szlazak

    Dans un arrêt du 10 juin 2021[1] la deuxième chambre de la Cour de cassation a défini les critères d’appréciation à appliquer par les juges du fond lorsque le droit d’établir ou de conserver une preuve avant tout procès se heurte au secret des affaires.

    Pour mémoire, l’article 145 du Code de procédure civile dispose que « S’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir, avant tout procès, la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées, à la demande de tout intéressé. »

    La Cour de cassation avait déjà établi que la demande de mesure d’instruction devait reposer sur des faits précis, objectifs et vérifiables, qui permettaient de projeter un litige futur comme plausible et crédible. Ainsi, la mesure sollicitée doit être légalement admissible et ne doit pas être demandée dans le seul objectif de contourner un secret légitime comme le secret des affaires.

    La haute juridiction ajoute que : « Si le secret des affaires ne constitue pas en lui-même un obstacle à l’application des dispositions de l’article 145 du Code de procédure civile, c’est à la condition que le juge constate que les mesures qu’il ordonne procèdent d’un motif légitime, sont nécessaires à la protection des droits de la partie qui les a sollicitées et ne portent pas une atteinte disproportionnée aux droits de l’autre partie au regard de l’objectif poursuivi ». 

    La protection du secret des affaires est un droit consacré par l’article L. 151-1 du Code de commerce qui définit le secret comme : « toute information répondant aux critères suivants :

    1° Elle n’est pas, en elle-même ou dans la configuration et l’assemblage exacts de ses éléments, généralement connue ou aisément accessible pour les personnes familières de ce type d’informations en raison de leur secteur d’activité ;

    2° Elle revêt une valeur commerciale, effective ou potentielle, du fait de son caractère secret ;

    3° Elle fait l’objet de la part de son détenteur légitime de mesures de protection raisonnables, compte tenu des circonstances, pour en conserver le caractère secret. »

    Ainsi, placé devant un conflit entre le droit de la preuve et un secret d’affaires, le juge du fond devra procéder à une double vérification : l’existence d’un motif légitime et la proportionnalité des mesures envisagées.

    Il en résulte que les mesures d’investigation générale sont exclues.

    Dans l’arrêt commenté, une société soupçonnant des actions de concurrence déloyale et de dénigrement de la part de plusieurs concurrents, avait sollicité du Juge des Référés des mesures d’instruction sur le fondement de l’article 145 du Code de procédure civile. Le premier juge et les juges d’appel ont fait droit à la demande d’instruction, en relevant que les mesures ordonnées ne ciblaient ni des documents personnels, ni des documents couverts par un secret d'ordre professionnel ou médical et qu’il s’agissait de recourir à des mots-clés pour découvrir l'identité des auteurs des messages dénigrants. Deux sociétés visées par ces ordonnances ont alors formé un pourvoi en cassation, notamment au motif de la violation du secret des affaires.

    Dans son arrêt, la Cour de cassation a considéré qu’il ne ressortait pas de l’arrêt de la Cour d’appel que les mesures d’instruction avaient été suffisamment circonscrites dans le temps et dans leur objet et que « l’atteinte portée au secret des affaires était limitée aux nécessités de la recherche des preuves ».

    L’arrêt est donc cassé pour défaut de base légale.

    Face à ce contrôle renforcé, il appartient donc aux avocats confrontés au secret des affaires de rédiger une requête in futurum avec précision et une motivation particulière, de circonscrire les mesures demandées à ce qui est strictement nécessaire et de les limiter dans le temps.

     (1) Cass. Civ. 2ème, 10 juin 2021, 20-11.987

    Michilus AH2113 AG 3 web

    Crédit dessin: Michel Szlazak

    Comment réunir ses associés et dirigeants dans le respect des règles de droit lorsque les déplacements sont limités par les mesures sanitaires en cours ?

    Depuis le 25 mars 2020, nous vous avons régulièrement écrit au sujet du dispositif d’exception mis en place depuis le début de la crise du COVID-19, dispositif qui permet la tenue des assemblées à « huis clos », en conférence téléphonique ou en visioconférence, et qui facilite la consultation des associés ou des organes de direction ou de surveillance par écrit par préférence à la traditionnelle réunion physique en assemblée ou comité.

    Le décret du 9 mars 2021 n° 2021-255 a prorogé l’ensemble du dispositif mis en place depuis le premier confinement, modifié depuis en décembre 2020 et qui devait prendre fin le 1er avril 2021. Ces mesures sont désormais en vigueur pour la durée maximale autorisée par l’ordonnance du 25 mars 2020 n° 2020-321 et son décret d’application n° 2020-418 modifié, à savoir, jusqu’au 31 juillet 2021.

    Michilus AH2106 LBO 01

    Crédit dessin: Michel Szlazak

    Les montages de LBO ne sont pas sans risques. Dans son arrêt du 9 septembre 2020, la Cour de cassation est venue sanctionner les dirigeants d’une SAS qui avaient proposé une distribution de dividendes ayant mis en difficulté la société trois ans plus tard (Cass. com., 9 sept. 2020, n° 18-12444). Cette distribution de dividendes était voulue par la holding mère qui devait faire face à ses échéances de remboursement du LBO. Pour autant, la Cour de cassation ne retient pas le raisonnement “groupe” des dirigeants qui ont mis en péril la société filiale en rendant possible cette distribution, et les a condamnés au comblement du passif social.

    Cette position peut sembler sévère dès lors que ce sont les associés et non les dirigeants qui ont voté cette distribution de dividendes, les dirigeants n’ayant fait que la rendre possible en la proposant à l’assemblée.

    Cet arrêt marque tout l’intérêt pour les dirigeants de justifier la distribution de dividendes, d’en documenter la conformité avec l’intérêt social et, à défaut, d’y faire obstacle afin de ne pas engager leur responsabilité.

     

    Michilus AH51

    Crédit dessin: Michel Szlazak

    Nous vous avions écrit en mars dernier au sujet des règles dérogatoires de réunion des organes délibérants des sociétés durant l’épidémie, et qui permettaient pour l’essentiel aux personnes morales de droit privé (et entités de droit privé dépourvues de la personnalité morale) de tenir leurs assemblées et autres réunions des organes collégiaux à huis clos, en recourant à la visio-conférence ou audiovisuelle ou encore à la consultation écrite suivant des conditions fixées par l’ordonnance n° 2020-321 du 25 mars 2020. Ces règles ont pris fin le 30 novembre 2020, mais ont repris cours, moyennant quelques aménagements, pour les réunions qui se tiendront jusqu’au 1er avril 2021 (ou jusqu’au 31 juillet 2021 sur décret), avec l’ordonnance du 2 décembre 2020 (n° 2020-1497).

    Il demeure néanmoins un « vide juridique » regrettable entre le 30 novembre 2020 et le 3 décembre 2020, date de publication de l’ordonnance.

    Dans l’ensemble, la plupart des dispositions exceptionnelles demeurent inchangées à l’exception de celles qui suivent.

    NULLITE DE L’ASSEMBLEE

    Tout d’abord, la nullité de l’assemblée en raison d’une convocation par voie postale non parvenue (évidemment pour des raisons externes à l’auteur de la convocation) est désormais écartée pour toutes les entités visées par l’ordonnance et non plus seulement pour les sociétés cotées.

    LES MOTIFS DU RECOURS AU HUIS CLOS

    L’ordonnance du 25 mars 2020 autorisait initialement la tenue de telles assemblées lorsque le lieu prévu pour la réunion était « affecté à la date de la convocation ou à celle de la réunion par une mesure administrative limitant ou interdisant les rassemblements collectifs pour des motifs sanitaires ». Cette disposition est remplacée par la preuve qu’à la date de la convocation de l’assemblée ou à celle de sa réunion, une mesure administrative limitant ou interdisant les déplacements ou les rassemblements collectifs pour des motifs sanitaires fait obstacle à la présence physique à l’assemblée de ses membres ». L’appréciation devra donc désormais se faire in concreto.

    DELEGATION DE CONVOCATION

    Par ailleurs, la délégation de convoquer une assemblée à huis clos, qui ne pouvait être donnée initialement qu’au seul représentant légal du groupement par l’organe compétent pour décider la convocation, pourra être donnée à toute personne.

    LA PROTECTION DES ACTIONNAIRES DE SOCIETES COTEES RENFORCEE

    En outre, le législateur a entendu renforcer la protection des actionnaires de société cotée (autre qu’une Sicav) en cas de tenue d’une l’assemblée à huis clos sans possibilité d’y participer par voie de conférence téléphonique ou audiovisuelle, en imposant :

    • la retransmission de l’assemblée en direct, à moins que des raisons techniques rendent impossible ou perturbent gravement cette retransmission, et en assurant une rediffusion de l’assemblée en différé ;
    • la publication des questions écrites posées par les actionnaires et des réponses qui y sont apportées sur le site internet de la société.

     VOTE PAR CORRESPONDANCE GENERALISE

    Afin de faciliter l’exercice du droit de vote par les associés ne participant pas à l’assemblée, le vote par correspondance est désormais autorisé sur décision de l’organe compétent pour convoquer l’assemblée ou son délégataire par toutes les entités visées par l’ordonnance (à l’exception des sociétés cotées), sans qu’une clause des statuts ne soit nécessaire à cet effet ni ne puisse s’y opposer. Ce vote est possible quel que soit l’objet de la décision.

    Pour les entités pour lesquelles le vote par correspondance n’est pas admis en période normale, un décret d’application précisera les conditions d’exercice de ce vote.

     CHANGEMENT DES MODES DE PARTICIPATION A L’ASSEMBLEE

     Désormais, une société cotée décidant de modifier le mode de participation à l’assemblée pour un mode alternatif devra en avertir ses associés non seulement « dès que possible », mais surtout « au plus tard trois jours ouvrés au moins avant la date de l’assemblée », alignant ainsi le régime sur les entités non cotées.

    En outre, inversement, si après avoir convoqué pour une tenue de l’assemblée sur un mode alternatif, il était finalement décidé de tenir physiquement l’assemblée, la nouvelle ordonnance précise que les associés doivent alors en être informés dans les mêmes conditions que dans le cas inverse. Dans les sociétés cotées, ce changement ne remet toutefois pas en cause l’obligation de retransmettre l’assemblée et de publier les questions écrites des associés sur le site internet de la société.

     CONSULTATION ECRITE DES ASSOCIES

    Enfin, la voie de la consultation écrite est désormais étendue à toutes les entités visées par l’ordonnance, à l’exception des sociétés cotées, y compris celles pour lesquelles la loi ne prévoit pas déjà ce mode de consultation.

    Le cabinet est à votre disposition pour vous accompagner dans le choix du mode de réunion ainsi que dans la rédaction des convocations et de la documentation juridique.

     Comme annoncé par le gouvernement, le projet de loi de finance a été enrichi d’un article complémentaire concernant le crédit d’impôt en faveur des bailleurs ayant consenti un abandon définitif de loyer à leur locataire durant la période d’application des restrictions de déplacement prévues à l’article 4 du décret n° 2020‑1310 du 29 octobre 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l’épidémie de covid-19 dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire (dont l’issue n’est pas encore connue).

    Un crédit d’impôt pour qui ?

    Les bailleurs, personnes physiques ou morales de droit privé, pourront bénéficier d’un crédit d’impôt au titre des abandons ou renonciations définitifs de loyers (hors accessoires échus ou à échoir) consentis au profit d’entreprises locataires qui remplissent les conditions suivantes :

    • Locataires exploitant des locaux faisant l’objet d’une interdiction d’accueil du public au cours de la période concernée ou exerçant leur activité principale dans un secteur mentionné à l’annexe 1 du décret n° 2020‑371 du 30 mars 2020 (soit principalement les secteurs de l’hôtellerie, restauration, les clubs de sport, cinémas, voyagistes, galeries d’art, transport, etc.);
    • Ayant un effectif de moins de 5 000 salariés[1];
    • N’étant pas en difficulté au 31 décembre 2019, au sens du règlement (UE) n° 651/2014 
    • Ni en liquidation judiciaire au 1er mars 2020.

    Lorsque l’entreprise locataire est exploitée par un ascendant, un descendant, ou un membre du foyer fiscal du bailleur, ou lorsqu’il existe des liens de dépendance entre elle et le bailleur, le bénéfice du crédit d’impôt est subordonné à la condition que le bailleur puisse justifier par tous moyens des difficultés de trésorerie de l’entreprise locataire.

    Crédit d’impôt mis en place

    Le crédit d’impôt est égal à 50 % de la somme totale des abandons ou renonciations de loyers visés par la mesure.

    Toutefois, pour les entreprises locataires de 250 salariés ou plus, le montant de l’abandon ou de la renonciation consenti par le bailleur du local au titre d’un mois ne sera retenu que dans la limite des deux tiers du montant du loyer prévu au bail.

    Enfin, le montant total des abandons ou renonciations de loyers donnant lieu à crédit d’impôt dont bénéficie chaque entreprise locataire ne pourra excéder un plafond de 800 000 €.

    En pratique

    Le crédit d’impôt s’applique pour le calcul de l’impôt sur le revenu dû par le contribuable au titre de l’année civile au cours de laquelle les abandons ou renonciations définitifs de loyers ont été consentis, y compris en cas de clôture d’exercice en cours d’année civile.

    Le crédit d’impôt est imputé sur l’impôt sur les sociétés dû par l’entreprise au titre de l’exercice au cours duquel les abandons ou renonciations définitifs de loyers ont été consentis.

    Dans les deux cas, si le montant du crédit d’impôt excède l’impôt dû au titre de cet exercice, l’excédent est restitué.

    Par dérogation, le crédit d’impôt serait imputable sur l’impôt sur le revenu ou sur les sociétés, selon les cas, dû au titre de l’année 2021.

    Pour bénéficier du crédit d’impôt, les bailleurs devront déposer une déclaration conforme à un modèle établi par l’administration dans les mêmes délais que la déclaration annuelle de revenu ou de résultat.

    Si le dispositif est louable, on regrette que seuls certains commerces en difficulté soient visés par la mesure et qu’aucune condition de perte de chiffre d’affaires n’ait pas été posée… Nous suivrons pour vous comment ce dispositif sera définitivement adopté.

     

    [1] apprécié au sein de groupe de sociétés en cas de sociétés contrôlées ou contrôlantes au sens de l’article L. 233-3 du Code de commerce. Des dispositions spécifiques s’appliquent aux associations.

    Le projet de loi de financement 2021 prévoit une mesure de simplification et d’allègement des charges, certes symbolique, mais bienvenue !

     

    L’article 18 du projet de loi de finances pour 2021 supprime à compter du 1er janvier prochain le caractère obligatoire de l’enregistrement des opérations suivantes :

    • Les augmentations de capital en numéraire et par incorporation de bénéfices, de réserves de réserves ou de provisions et des augmentations nettes de capital de société à capital variable constatées à la clôture d’un exercice ;
    • L’amortissement ou la réduction du capital ;
    • La formation de GIE.

    Le législateur poursuit donc le mouvement de suppressions successives de ces dernières années, qui cible les opérations du droit des sociétés à faible coût (généralement comprises entre 375 et 500 €), afin d’alléger les charges des entreprises et fluidifier l’activité économique.

    En outre, les sociétés qui, après la réalisation de l’opération, ont besoin d’un extrait Kbis à jour rapide (notamment pour débloquer les sommes apportées au titre de l’opération pour les augmentations de capital) peuvent se réjouir car si cet article est bien adopté en l’état, il sera désormais possible de procéder aux formalités auprès du greffe du tribunal avant l’exécution de la formalité d’enregistrement, même lorsque celle-ci est obligatoire, ce qui ralentissait jusqu’à présent l’accomplissement des formalités.

    Une mesure de simplification et d’allègement des charges certes symbolique mais bienvenue !

     

    L’article 3 de l’ordonnance n° 2020-318 du 25 mars 2020 permet aux personnes morales de droit privé de différer de trois mois maximum leurs assemblées générales d’approbation des comptes[1].

    Ainsi, les entités ayant clôturé leurs comptes au 31 décembre 2019 ne disposent plus que de quelques semaines pour préparer le juridique de leurs assemblées générales et procéder aux convocations de leurs membres, pour une réunion au plus tard au 30 septembre 2020.

    Pour celles qui ne seraient pas prêtes à cette date, le dépôt d’une requête motivée au tribunal compétent avant le 30 septembre pourrait toujours leur permettre d’obtenir un délai supplémentaire, dans les conditions du droit commun.

    Le Cabinet est mobilisé à vos côtés pour vous assister dans ces démarches.

     

    [1] sauf à ce que le commissaire aux comptes désigné ait déjà rendu son rapport au 12 mars 2020

    COVID-19 et entreprises en difficultés : les procédures collectives à l’heure de l’état d’urgence sanitaire

     

    Les mesures prises pour endiguer l’épidémie de COVID-19 impactent d’ores-et-déjà durement les entreprises et risquent d’avoir, à court terme, des conséquences funestes sur l’économie mondiale. Ainsi, selon certains experts, les défaillances d’entreprises vont connaitre une hausse spectaculaire de près de 25% dans les mois à venir, quand bien même l’activité économique redémarrerait graduellement (source : coface.fr).

    C’est dans ce contexte que le gouvernement, habilité par la loi d’urgence n° 2020-290 du 23 mars 2020, a pris, le 27 mars 2020, l’ordonnance n° 2020-341 portant adaptation des règles relatives aux difficultés des entreprises et des exploitations agricoles à l’urgence sanitaire et modifiant certaines dispositions de procédure pénale.

    L’objectif de l’ordonnance est d’anticiper les difficultés des entreprises en adaptant le cadre légal des procédures collectives aux conséquences de la crise sanitaire.

    Ces règles dérogatoires visent la fixation dans le temps de l’état de cessation des paiements mais aussi l’adaptation des contraintes chronologiques des procédures :

    • Règles dérogatoires relatives à fixation dans le temps de l’état de cessation des paiements 

    S’agissant de l’état de cessation des paiements, les articles 1 et 3 de l’ordonnance précitée fixent au 12 mars 2020 l’appréciation de la situation des entreprises ou des exploitations agricoles. Cette date correspond peu ou prou à la date de survenance de la crise.

    Ce gel de leurs situations permet aux entreprises de pouvoir bénéficier des mesures ou procédures préventives même si elles connaissaient une aggravation de leur situation provoquant la cessation des paiements postérieurement au 12 mars, et ce pendant toute la période d’état d’urgence sanitaire majorée de trois mois.

    Cette disposition vise principalement les procédures de conciliation et les procédures de sauvegarde.

    En matière de sauvegarde, seul le débiteur peut demander, du fait de l’aggravation de la situation de l’entreprise, l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire, de liquidation judiciaire ou le bénéfice d’un rétablissement professionnel.

    Comme le précise le rapport au Président de la République de la présente ordonnance : « la fixation au 12 mars 2020 de la date de l’appréciation de l’état de cessation des paiements ne peut être conçue que dans l’intérêt du débiteur, ce qui évite, en outre, qu’il ne s’expose à des sanctions personnelles pour avoir déclaré tardivement cet état. Toutefois, il convient de réserver les possibilités de fraude aux droits des créanciers, tant de la part du débiteur que d’autres créanciers, ce qui justifie également l’application des dispositions de l’article L. 631-8 du code de commerce, relatif aux nullités de la période suspecte ».

    • Règles dérogatoires relatives à l’adaptation des contraintes chronologiques des procédures.

    Afin que les troubles nés de la période d’urgence sanitaire ne mettent en péril la recherche de solutions préventives ou la mise en œuvre d’un plan de sauvegarde ou de redressement, les dispositions de l’article 1er de l’ordonnance « assouplissent les contraintes de temps imposées par les dispositions relatives à la conciliation, d’une part, et à l’exécution d’un plan de sauvegarde ou de redressement, d’autre part ».

    a/ En ce qui concerne, d’abord, la procédure de conciliation, outre une série de mesures plus générales simplifiant la procédure d’ouverture en évitant au débiteur de comparaître devant le tribunal, l’alinéa 1er du II de l’article 1er dispose que la durée de la conciliation est prolongée de plein droit de trois mois après la date de cessation de l’état d’urgence. De plus, l’alinéa 2 du II de l’article 1er précité permet, en outre, de reprendre les négociations sans attendre, en cas d’échec d’une première recherche d’accord, pendant toute la durée de l’état d’urgence sanitaire.

    b/ En ce qui concerne, ensuite, la période d’observation, le 1° du II de l’article 2 de l’ordonnance tire également les conséquences de l’impossibilité de respecter certains délais prévus par le livre VI du code de commerce. Il prolonge ainsi, de plein droit et sans qu’il soit nécessaire de tenir une audience ou de rendre un jugement la durée de la période d’observation jusqu’à l’expiration d’un délai d’un mois après la date de fin de l’état d’urgence, et pour une durée équivalente à celle-ci, plus un mois.

    A noter également, conformément au 1° du I de l’article 2 de l’ordonnance, que « pendant la durée correspondant à l’état d’urgence, prolongée d’un mois, il n’apparaît pas justifié de tenir systématiquement une audience intermédiaire pour s’assurer de la possibilité, pour l’entreprise, de maintenir son activité pendant la période d’observation du redressement judiciaire.[...] Cette adaptation ne fait pas obstacle à ce que le tribunal puisse, le cas échéant, être saisi d’une demande de conversion de la procédure ».

    c/ En ce qui concerne, également, la durée des plans, plusieurs niveaux de prolongations sont prévus :

    Premièrement, le débiteur peut bénéficier d’une prolongation de plein droit du plan de redressement de son entreprise.

    En effet, l’article 2, II, de l’ordonnance n° 2020-341 du 27 mars 2020 prévoit une prolongation de plein droit, hors processeurs judiciaire, des durées « relatives à la période d'observation, au plan, au maintien de l'activité, et à la durée de la procédure de liquidation judiciaire simplifiée ».

    Cette prolongation vaut jusqu’à l’expiration d’un délai d’un mois après la date de fin de l’état d’urgence sanitaire, et sera d’une durée équivalente à celle de la période de l’état d’urgence sanitaire augmentée d’un mois.

    Par exemple, si la période de crise sanitaire se conforme à sa durée initiale, soit 2 mois, le report sera de 3 mois à compter du 24 juin (24 mars + 2 mois d’état d’urgence + 1 mois prévu au I de l’article susmentionné) et prendra donc fin le 24 septembre prochain (3 mois supplémentaires).

    Deuxièmement, le débiteur peut également espérer bénéficier d’une prolongation sur requête du plan de redressement de son entreprise.

    En effet, des délais supplémentaires sont prévus mais ne peuvent être accordés que sur requête. L’initiative appartient toutefois au commissaire à l’exécution du plan et/ou au ministère public :

    • D’une part, conformément à l’article 1er, III, 1° de l’ordonnance précitée, le président du tribunal peut, sur requête du commissaire à l’exécution du plan et jusqu’à l’expiration d’un délai de trois mois après la date de fin de l’état d’urgence sanitaire, prolonger les plans pour une durée maximum équivalente à celle de l’état d’urgence, plus trois mois. Le second alinéa du 1° de l’article 1er dispose également qu’une prolongation d’une durée maximale d’un an peut être prononcée sur requête du ministère public.
    • D’autre part, conformément à l’article 1er, III, 2° de l’ordonnance, suite à l’expiration du délai de trois mois après la date de fin de l’état d’urgence, « et pendant un délai de six mois, sur requête du ministère public ou du commissaire à l'exécution du plan, le tribunal peut prolonger la durée du plan pour une durée maximale d'un an ».

    Toutefois, comme le précise le rapport au Président de la République, « ces prolongations de la durée du plan sont possibles sans devoir respecter la procédure contraignante d’une modification substantielle du plan initialement arrêté par le tribunal, laquelle reste par ailleurs envisageable ».

                  d/ En ce qui concerne, enfin, la prolongation des délais de couverture des créances salariales, le 2° du I de l’article 1er de l’ordonnance permet, pendant la période d’état d’urgence sanitaire majorée de trois mois, « une prise en charge accélérée par l’association pour la gestion du régime de garantie des créances des salariés (AGS) ».

    Si le représentant des salariés et le juge-commissaire ne sont pas écartés, il est toutefois permis, sans attendre leur intervention, au mandataire judiciaire de transmettre à l’AGS les relevés de créances salariales qui permettront à cette dernière de déclencher le versement des sommes correspondantes.

    Qui plus est, comme le souligne le rapport au Président de la République, il est « impossible, par exemple, de procéder à la rupture des contrats de travail dans le délai de quinze jours à compter du jugement d’ouverture d’une procédure de liquidation judiciaire. Or, le non- respect de ce délai est une cause de refus de prise en charge par l’AGS. La prolongation du délai accordé au mandataire de justice n’aurait pas de sens si les limites de la garantie de l’AGS n’étaient pas adaptées ».

    Raison pour laquelle les délais de couverture des créances salariales par l’AGS visés à l’article L. 3253-8 du code du travail sont prolongés jusqu’à l’expiration d’un délai d’un mois après la date de fin de l’état d’urgence et pour une durée équivalente à cette période, plus un mois.

    Le COVID-19 et les mesures de confinement qui l’accompagnent perturbent indéniablement la réunion des organes sociaux des entreprises. C’est pourquoi la loi n°2020-290 du 23 mars 2020 a autorisé le gouvernement à prendre l’ordonnance portant adaptation des règles de réunion et de délibération des assemblées et organes dirigeants des personnes morales et entités dépourvues de personnalité morale de droit privé en raison de l’épidémie de covid-19. (Ordonnance n° 2020-321 du 25 mars 2020).

    • Les entités visées par le texte sont les personnes morales et entités dépourvues de personnalité morale de droit privé, et notamment :
    • Les sociétés civiles et commerciales ;
    • Les masses de porteurs de valeurs mobilières ou de titres financiers ;
    • Les groupements d’intérêt économique et les groupements européens d’intérêt économique ;
    • Les coopératives ;
    • Les mutuelles, unions de mutuelles et fédérations de mutuelles ;
    • Les sociétés d’assurance mutuelle et sociétés de groupe d’assurance mutuelle ;
    • Les instituts de prévoyance et sociétés de groupe assurantiel de protection sociale ;
    • Les caisses de crédit municipal et caisses de crédit agricole mutuel ;
    • Les fonds de dotation ;
    • Les associations et les fondations.

     

    • Les assemblées générales

    RECOURS A LA VISIOCONFERENCE OU A LA CONFERENCE AUDIO

    Lorsqu'une assemblée – quel que soit son ordre du jour – doit être convoquée en un lieu affecté par une mesure administrative limitant ou interdisant les rassemblements collectifs pour des motifs sanitaires, l'organe compétent pour la convoquer ou le représentant légal agissant sur délégation de cet organe, pourra décider qu'elle se tiendra sans que les membres ne soient présents physiquement. Le principe d’une tenue par conférence téléphonique ou audiovisuelle est par conséquent validé.

    Pour ce faire, et même en cas de clause statutaire contraire, les membres ayant le droit d’assister à l’assemblée (associés, membres, mais aussi commissaires aux comptes, représentants des IRP, …) doivent être avisés par tout moyen de la date et de l’heure de l’assemblée générale.

    En conséquence, seront comptabilisés dans le calcul du quorum et de la majorité des assemblées, les membres participant à une conférence téléphonique ou une conférence audiovisuelle pourvu que ce moyen permette leur identification et leur assure une retransmission continue et simultanée des délibérations ainsi que la transmission au moins de la voix des participants afin de pouvoir établir un échange.

    Toutefois, ces dispositions ne sont pas applicables aux sociétés anonymes et aux obligataires, qui disposent déjà de dispositions spéciales permettant le vote par correspondance ou le recours à la visioconférence (articles L. 225-107 et L. 228-61 du Code de commerce).

    RECOURS A LA CONSULTATION ECRITE

    Les règles du recours à la consultation écrite sont également assouplies, et il est désormais permis d’y avoir recours pour les groupements dont la loi autorise le recours à une telle consultation, même lorsque les statuts ne le prévoient pas ou l’interdisent.

    DES FORMALITES SIMPLIFIEES

    Provisoirement, l’exercice du droit d’information et la demande de documents préalablement à l’assemblée générale peuvent se faire par voie électronique.

    S’agissant des sociétés cotées, lorsque la convocation des membres de la société devant être réalisée par voie postale n’a pu l’être en raison de circonstances extérieures à la société, dans le contexte de l’épidémie de covid-19, la sanction de nullité de l’assemblée est écartée. Si la convocation a été faite avant la décision de confinement du territoire national, la modification du lieu de l’assemblée générale ou des modes de participation ne nécessite pas un renouvellement de la formalité. Toutefois, l’information devra être accomplie par voie de communiqué par la société cotée.

    Pour les autres groupements, dans l’hypothèse où les formalités de convocations ont été effectuées avant la mesure de confinement, les membres sont informés par tous moyens permettant le respect de leur droit d’information effective, 3 jours ouvrés au moins avant la date de l’assemblée générale. Etant précisé que la modification du lieu de l’assemblée ne donne pas lieu à une nouvelle formalité de convocation.

     

    • Le fonctionnement des organes collégiaux d’administration, de surveillance et de direction

     Les membres des organes collégiaux d’administration, de surveillance et de direction pourront également se réunir par le biais d’un moyen de télécommunication tel que la conférence téléphonique ou la conférence audiovisuelle permettant leur identification et leur participation effective à cette réunion assurant une transmission au moins de la voix et d’une retransmission des débats de manière continue et simultanée, et ce, quel que soit l’objet de la décision.

    La voie de la consultation écrite est également autorisée.

     

    • Pendant combien de temps ?

    Les mesures édictées on un effet rétroactif au 12 mars 2020 et perdureront jusqu’au 31 juillet 2020 sauf prorogation de ce délai fixé par décret en Conseil d’Etat, qui ne pourra être toutefois étendu après le 30 novembre 2020.

    Toutefois, le rapport au Président de la République relatif à cette ordonnance souligne le caractère facultatif des différentes mesures et incite les groupements à organiser une sortie progressive du dispositif d’exception résultant de ce texte, dès lors que son application ne paraîtra plus nécessaire au regard des circonstances propres à chaque groupement.

    Nos équipes sont à votre écoute pour vous accompagner dans ce contexte inédit.