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    mercredi, 05 octobre 2022 13:25

    Violation d’une clause d’intuitu personae et agent commercial.

    Écrit par Me Valentine Wirig

    Mich AH2240 loyaute web

    Crédit dessin: Michel Szlazak

    La Cour de cassation, chambre commerciale le 29 juin 2022 n°20-11.952 et 20-13.228 a jugé que les agents commerciaux s’abstenant d’informer leur mandant d’un changement de direction ou d’actionnariat manquent à leur obligation de loyauté. Ce faisant ils commettent une faute grave justifiant la résiliation du contrat sans indemnité.

    Rappelons que l’article L134-12 du Code de commerce prévoit que « en cas de cessation de ses relations avec le mandant, l’agent commercial a droit à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi. ». Cette indemnité n’est écartée que dans les cas limitativement énumérés par l’article L134-13 parmi lesquels figure la faute grave de l’agent commercial. On peut citer à titre d’exemple l’exercice d’une activité parallèle de l’agent même en l’absence de clause d’exclusivité, le désintérêt pour la vente des produits du mandant qui constituent des cas de faute grave.

    Dans ces deux arrêts, une clause contractuelle avait été stipulée dans les contrats et prévoyait un agrément par le mandant en cas de changement de direction ou d’actionnariat. Le mandant ayant été informé tardivement voire pas du tout pour le premier arrêt, les contrats furent résiliés pour faute grave.

    La Cour de cassation interrogée sur la validité de telle clause dans le contrat d’agent commercial, contourne la question et préfère invoquer le manquement à l’obligation de loyauté pour caractériser la faute grave. L’agent doit donc être loyal à son mandant clause d’intuitu personae ou non.

    La Cour de cassation par le raisonnement adoptée confère ainsi une pleine efficacité aux clauses d’intuitu personae et d’agrément, en privant l’agent commercial de son indemnité de fin de contrat en cas de violation.

    Cependant ce stratagème permet à la Cour de cassation de maintenir un flou juridique quant à la possibilité de contractualiser la faute grave. Les dispositions de l’article L134-12 étant d’ordre public, il n’est pas possible de les écarter mais peut-on qualifier contractuellement tel ou tel comportement de faute grave ? Rien n’est moins sûr. La Cour de cassation considère que c’est le manquement à l’obligation de loyauté qui constitue une faute grave, et pas la violation directement desdites clauses. C’est parce que l’agent commercial n’a pas informé son mandant de son changement d’actionnariat, qu’il a manqué à son obligation de loyauté. Ce manquement constituant une faute grave justifiant la perte de son indemnité de fin de contrat.

    Le praticien devra donc être prudent s’il décide par avance de définir contractuellement la faute grave. L’agent commercial, lui, devra garder à l’esprit qu’il est débiteur d’une obligation de loyauté envers son mandant, et que tous les changements importants de sa situation devront être communiqués à son mandant.