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    mardi, 15 février 2022 09:07

    Cession de titres sociaux : du nouveau sur la garantie d’éviction du cédant.

    Écrit par

    Mich AH2207 retablissement

    Crédit dessin: Michel Szlazak

    L’interdiction de rétablissement sur le fondement de la garantie d’éviction est désormais limitée dans le temps (Cass. Com. 10 novembre 2021, n° 21-11975).

    Si vous vendez votre entreprise, vous devez assurer la possession paisible de cette société à votre acheteur : c’est la définition, simplifiée, de la garantie d’éviction. Elle implique notamment l’interdiction pour le vendeur de se rétablir après la vente et de capter ainsi à nouveau la clientèle vendue.

    Cette garantie est, en matière de cession de titres sociaux, assez rarement actionnée car les cessions sont généralement encadrées par des clauses de non-concurrence qui encadrent plus efficacement les détournements de clientèle.

    Elle reste néanmoins un recours utile en l’absence de clause de non-concurrence ou lorsque le délai fixé par la clause est dépassé.

    Mais dans ce cas, la jurisprudence impose, pour conclure à une interdiction de rétablissement, que « ce rétablissement soit de nature à empêcher les acquéreurs [des actions cédées] de poursuivre l’activité économique de la société et de réaliser l’objet social » (Cass. Com., 21 janvier 1997, n°94-15207).

    Or, la Cour de cassation vient d’ajouter un autre critère à une demande tendant à l’interdiction de rétablissement sur le fondement de la garantie d’éviction : il faut désormais que l’interdiction de rétablissement soit proportionnée aux intérêts légitimes à protéger, et donc qu’elle soit limitée dans le temps. Les juges sont donc désormais invités à rechercher si l’interdiction de se rétablir se justifiait « encore » au moment des faits reprochés (Cass. Com. 10 novembre 2021, n° 21-11975).

    Les faits de l’espèce semblaient pourtant édifiants : les vendeurs ne contestaient pas avoir rouvert une activité concurrente, récupéré 8% de la clientèle de la société cédée, débauché environ 20% des salariés... oui mais 3 ans après la cession pour le premier vendeur et 4 ans après pour le deuxième. Les magistrats qui se repencheront sur cette affaire devront donc apprécier in concreto si cette durée était suffisante, et si une interdiction de rétablissement si longue ne violerait pas, finalement, la liberté du commerce et de l’industrie et la liberté d’entreprendre.